Une grande première sur BD Paradisio :
La prépublication complète d'une bande dessinée sur le Net
"L'Horloge" par José Roosevelt aux Editions Paquet



Il y a longtemps que nous y pensions. Pierre Paquet et José Roosevelt ont rendu cette expérience possible. BD Paradisio a le plaisir de vous présenter le premier tome d'une oeuvre superbe, qui en comptera trois au total, éditée aux Editions Paquet. Chaque semaine, vous avez eu la possibilité de découvrir 10 nouvelles planches de l'album. La totalité des planches sont actuellement visibles sur le site. D'ici quelques jours, un concours vous permettra de gagner l'album dédicacé par l'auteur (10 albums seront mis en jeu).

Lien vers la bande dessinée

José Roosevelt

José Roosevelt, peintre et dessinateur d’origine brésilienne, habite depuis dix ans en Suisse. Très productif dans le milieu de la peinture comme dans celui de la bande dessinée, il nous livre ici un travail où la fantaisie est très présente, sans quitter les réflexions sur l’existence, l’amour, la création et la mort, qui sont toujours les moteurs de ses conceptions esthétiques. L’originalité du livre réside dans l’insertion des tableaux de Roosevelt, véritable fil conducteur de l’histoire en parallèle avec la quête spirituelle des personnages. Une foison de symboles mystico-religieux à découvrir pour tenter de comprendre l’origine et la signification des choses.

La trame du récit

L’intrigue débute en l’an mille quatre cents cinquante huit de la Croix autour d’une image interdite, «fruit d’une conspiration philosophique aux tendances hédonistes et panthéistes, qui voulait renverser les valeurs imposées par les autorités ecclésiastiques obéissant au Pape connu comme le Soldat Noir», une image vénérée par les Hérétiques du Champ de Roses. Les personnages principaux, Vi, Ian et Juanalberto sont liés par un rêve commun... qui les pousse à se retrouver à la fête de Miró pour rencontrer le Peintre. Mais ce dernier a été assassiné. Sans savoir pourquoi, ils sentent alors qu’ils doivent voir le corps. Dans la main rigide du Peintre, un morceau de toile plié que personne ne peut enlever, sauf Ian car cette toile lui était destinée. Sur la toile... Une horloge, un appareil automatique que les anciens utilisaient pour mesurer le temps, mais aussi une hérésie car le cercle est une figure sacrée donc interdite... Ian comprend le message de son ami et décide de partir chez les Hérétiques, en Occident, pour trouver la réponse aux énigmes de la vie, à la recherche de la vérité... Vi et Juanalberto l’accompagneront dans son périple en quête de leurs propres vérités.

Interview de José Roosevelt

BDP : Pourriez-vous en quelques mots décrire votre travail et le concept global de l'Horloge ?

Roosevelt : La bande dessinée "L'Horloge" a été inspirée par un tableau qui porte le même titre, tableau que j'ai peint en 1990. On peut voir une reproduction de la deuxième version de ce tableau au chapitre quatre de l'album. Cette deuxième version diffère très peu de la première, c'est une question de deux ou trois petits détails. L'idée m'est venue, encore en 1990, d'écrire une histoire qui se développe en ayant comme schéma l'horloge du tableau. Or, cette horloge avait une couleur par heure, ainsi qu'un être sorti du règne animal et un autre du règne végétal. Donc, cette histoire devait avoir douze chapitres et chaque chapitre devait avoir un rapport avec la couleur, l'animal et la plante correspondant à son heure. A l'époque, j'ai même ébauché un synopsis du scénario et dessiné quelques planches, sans toutefois beaucoup de conviction. J'ai abandonné ce travail, déchiré les planches, mais l'idée est restée dans ma tête en train de faire son chemin. En 1997, j'ai enfin décidé de reprendre cette idée et la travailler, rendant la trame encore plus complexe et en introduisant un tableau par chapitre. Pour le fil conducteur, d'abord une enquête policière, qui devient ensuite quête existentielle. Le défi que je m'était lancé à cette époque c'est celui d'écrire quelque chose de très intuitif, plein de fantaisie, onirique même, dans un cadre rigoureux dicté par le schéma de l'horloge. Cela en cherchant toujours à me faire plaisir, bien entendu.

BDP : D'où vous est venue l'idée du scénario ? Quelles sont vos grandes sources d'inspiration ?

Roosevelt : Nous vivons dans un monde immensément riche et complexe. Les sources d'inspiration sont partout. D'une façon plus précise, l'idée du scénario sort des romans d'aventure, avec leurs rebondissements spectaculaires, des histoires de détectives, des récits de quête spirituelle, des livres de science-fiction, enfin, que sais-je ? Je pense que la littérature y est pour beaucoup, et je rends hommage à cette activité humaine, surtout dans les tomes 2 et 3 de « L'Horloge ».

BDP : Religion, mythologie, astrologie, philosophie... D'où provient votre documentation et vos connaissances « encyclopédiques »? Cela a dû vous prendre un temps fou pour préparer cet ouvrage ?

Roosevelt : Je suis un curieux de tout, et je dévore les livres. La religion a été toujours un problème sur lequel je me suis penché, et avec elle toute sorte de mythologies. L'astrologie m'intéresse aussi, et la philosophie est incontournable... Ma documentation se trouve en partie dans ma mémoire et le reste on peut le trouver dans les bibliothèques. On ne peut parler de ce qu'on a vécu: L'Horloge est une espèce de résumé de beaucoup de mes préoccupations, des questions que je me suis posées et que je me pose encore. En fait, j'ai écrit le scénario de L'Horloge en deux mois et demi, mais il s'est construit dans mon cerveau pendant presque quarante ans.

BDP : N'a-t-on pas la crainte, justement, lorsque l'on réalise un ouvrage tellement construit et documenté, de freiner certains lecteurs, ou certains types de lectorat ? Etes-vous conscient que c'est un ouvrage extra-ordinaire (cela n'engage que moi) mais pas réellement facile d'accès ?

Roosevelt : Je crois que le lecteur de bandes-dessinées subit encore aujourd'hui le préjugé qui le classe comme un être intellectuellement faible, sans disposition pour la « bonne » lecture, qui évite ce qui demande de la réflexion. Il n'y a rien de plus faux. Je suis toujours étonné de la richesse des références culturelles qu'on trouve dans les récits de Corto Maltese ou dans les histoires de Bourgeon. Leur succès est là pour prouver que le lecteur a bon goût et ne craint pas l'intelligence ou la complexité d'un scénario.

BDP : On remarque que L'Horloge est construite selon un rythme bien précis, autour de 12 « tableaux ». Ces toiles sont également votre travail. Ces tableaux ont-ils été réalisés avant ou pendant le récit de l'Horloge ? Posée différemment : ces tableaux ont-ils été réalisés pour illustrer l'Horloge ou ont-ils été réalisés avant et ont été le prétexte de l'Horloge, cette dernière ayant été écrite autour des tableaux ?

Roosevelt : Il y a une troisième possibilité, et c'est la bonne : les tableaux existaient déjà, avant l'écriture du scénario de l'Horloge, à part le dernier, réalisé expressément pour illustrer le chapitre douze. Mais ils n'ont pas été le prétexte pour le scénario non plus - à part le tableau « L'Horloge », évidemment - et ont été choisis parmi des tableaux qui existaient déjà pour illustrer le récit. Comme j'ai produit plus de 400 peintures depuis le début de ma carrière et que j'ai des documents de presque toutes ces oeuvres, j'avais l'embarras du choix.

BDP (qui a eu la chance de lire l'ouvrage en entier) : La quête d'Ian nous fait penser à des récits du genre de la Quête du Graal ou la recherche de l'origine, de la connaissance... Qu'en est-il finalement ? Peut-on dire qu'il a finalement trouvé ce qu'il cherchait ? Ne reste-t-on pas avec beaucoup de points d'interrogation à la fin du récit ?

Roosevelt : Malheureux celui qui croit avoir trouvé toutes les réponses. C'est une erreur de croire qu'on n'a plus rien à apprendre. A chacun des lecteurs d'interpréter la fin de l'histoire, de répondre si oui ou non Ian a trouvé ce qu'il cherchait. A mon avis, une des principales qualités d'une oeuvre littéraire (y compris de la bande-dessinée, c'est clair) est celle de provoquer les questions, la réflexion, l'interprétation.

BDP : Ce récit a-t-il été conçu à l'origine pour être découpé en 3 volumes ? Ce découpage ne risque-t-il pas de nuire à cette continuité et à cette construction justement ?

Roosevelt : C'est l'éditeur qui a proposé le découpage, c'est vrai, pour des raisons commerciales. L'idée ne m'a jamais dérangé, par le simple fait qu'on pourra toujours lire les 3 volumes de suite, une fois qu'il seront disponibles. J'ai même fini par me rendre compte que le découpage facilitera un peu l'accès à l'Horloge: étant donné que le lecteur devra attendre quelques mois entre un tome et l'autre, le récit trouvera certains chemins et ouvrira certaines portes, dans la tête du lecteur, pendant ces pauses.

BDP : Pourquoi avoir choisi de parer les personnages d'attributs animaliers ? Ces attributs ont-ils des significations particulières? On peut remarquer que certains en ont davantage que d'autres, et certains n'en ont presque pas...?

Roosevelt : Et certains n'en ont pas de tout, si l'on a envie de considérer l'être humain comme n'étant pas un animal. Les attributs animaliers de certains personnages sont ma manière de dire que nous sommes tous fils de la même création, de la même Mère Nature, hommes et animaux. Mon monde sans racisme va bien au-delà des « races » humaines... Il y a sans doute de l'influence de certaines bandes-dessinées, aux personnages animaliers. Les attributs ont des significations particulières, bien entendu. Mais ils correspondent à des critères tellement personnels qu'il ne vaut pas la peine d'en parler ici.

BDP : D'une manière plus générale, quelles sont vos influences en matière de bande dessinée ?

Roosevelt : Tout le monde m'a influencé, d'Hergé à Trondheim, en passant par Barks, Jack Kirby, Mort Drucker, Moebius (incontournable), Manara, Hugo Pratt, Jeffrey Jones, et même si ça se voit moins, Druillet et Lauzier.

BDP : Cet ouvrage a été réalisé en solo ? Est-ce un choix éthique, définitif ou seriez-vous ouvert à une collaboration ? Avec qui par exemple ?

Roosevelt : L'Horloge a été réalisée en solo, si on exclut des crédits tous ceux qui, par leur oeuvre écrite, dessinée ou filmée, ont eu une participation dans la construction de ma vision de la bédé. Je n'ai aucun choix - moins encore éthique et définitif - dans ce domaine-là. Bien sûr que je serais ouvert à une collaboration. Avec qui ? Avec quelqu'un qui soit un amateur de bédé et qui prenne plaisir à se faire surprendre.

BDP : Pourriez-vous nous parler brièvement de vos projets ?

Roosevelt : J'ai écrit cet hiver un scénario pour une autre bande-dessinée, comptant aussi 144 pages (réparties en trois volumes également) et j'en suis aux toutes premières planches. Cet ouvrage s'appelle « La table de Vénus » et est, malgré le nombre de pages et de volumes, structuré à partir du nombre 7 (comme l'Horloge est strucuturée à partir du 12). La Table de Vénus est moins complexe que l'Horloge, le récit plus linéaire... mais exigera peut-être du lecteur une participation plus prononcée. Sur certains aspects, je pense que j'ai fait des progrès dans ce deuxième ouvrage.

BDP : Un tout grand merci pour cette interview.

Découvrez les 48 planches de la BD : 1 - 2 - 3 - 4 - 5 - 6 - 7 - 8 - 9 - 10 - 11 - 12 - 13 - 14 - 15 - 16 - 17 - 18 - 19 - 20 - 21 - 22 - 23 - 24 - 25 - 26 - 27 - 28 - 29 - 30 - 31 - 32 - 33 - 34 - 35 - 36 - 37 - 38 - 39 - 40 - 41 - 42 - 43 - 44 - 45 - 46 - 47 - 48

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