Dupuis success Story



Voici pour les inconditionnels de Spirou, Gaston, Buck Danny, les Schtroumpfs,... l' histoire de leur maison d'Edition - du moins à l'origine pour certains -. d'après un document professionnel de Dupuis de 1984 écrit par Alain de Kuyssche. Ce document fût illustré par des dessins de Jannin.


On pourrait d'abord dire que tout est parti d'une petite machine à imprimer: une Kobold à pédale. Mais, en vérité, c'est un homme qui est à la base des Editions Dupuis. M.Jean Dupuis n'avait que vingt-trois ans quand il s'installa maître imprimeur à Marcinelle, dans la maison familiale de la route de Philippeville. Nous sommes en 1898. La Belgique s'apprête à changer de siècle. Sous l'impulsion du roi Léopold II, elle n'a jamais offert autant de possibilités de réussite aux jeunes gens audacieux, honnêtes et travailleurs. Orphelin de mère à l'âge de deux ans, Jean Dupuis est élévé par les frère et soeurs de sa maman. Très jeune, il ira travailler dans diverses entreprises, où il apprendra les métiers d'imprimeur et de typographe. Les temps sont à l'audace.Jean Dupuis, employé aux établissements Wynstraeten, découvre, au hasard de ses lectures, la petite annonce suivante: "Un imprimeur de Glons offre un petit matériel d'imprimerie pour 300 francs". Sans prendre le temps d'hésiter, Jean Dupuis l'achète et se la fait livrer à Marcinelle. 1898.Retenez cette date.Une machine est montée dans une maison familiale. Un homme la transformera en Editions Dupuis.


Jean Dupuis tient un journal; on y trouve les joies et les peines, les déceptions et les espoirs, au jour le jour. Tout commence modestement: "Je vais voir des commerçants et des industriels du voisinage, mais je suis affligé d'un très grave défaut pour quelqu'un qui veut décrocher des commandes: je suis timide, et ...les affaires ne vont pas très bien". Les commandes, elles viendront pourtant. Au compte-gouttes. Et en passant par les conditions léonines des premiers clients... Bientôt, une machine neuve fait son apparition...dans la salle à manger de la route de Philippeville! Une "Julien" à 2.500 francs, à payer par mensualités de 50 francs. 1904.Parce que "les affaires vont très bien", comme l'écrit Jean Dupuis,"mes locaux se révèlent absoluments trop petits et j'achète un assez grand terrain à la rue Destrée et j'y fais construire un atelier, ainsi qu'une habitation". Dès 1911, la rue Destrée devient l'adresse officielle de l'imprimerie Dupuis. A plus d'un titre, 1914 est une année tragique pour Dupuis. En janvier, un incendie ravage l'atelier, détruisant vingt années de labeur. Mais Jean Dupuis ne se laisse pas longtemps abattre: "L'incendie avait été pour moi une rude épreuve.J'avais une dette importante; par contre (après la reconstruction), je me trouvais équipé d'une façon moderne". L'autre malheur arrivera en août: la guerre.

L'imprimerie Dupuis paiera son écot aux souffrances dues à la guerre. Mais, dès 1918, une nouvelle activité se pointe à la rue Destrée: le chamoine Parot confie l'impression de "L'ami du foyer" à Jean Dupuis. Ce bulletin paroissial constitue la première apparition d'une publication chez Dupuis. Il y en aura une autre: " Le roman" , fascicule hebdomadaire destiné à offrir une lecture saine aux familles trop souvent sollicitées par une presse raccoleuse et vulgaire. L'affaire capote, faute d'amateurs. Mais peut-être ce journal était-il mal adapté au marché ? Jean Dupuis a son idée ...Elle aboutit en 1922: "Je décide de réaliser enfin mon grand projet.La revue sera présentée sur une feuille de format Colombier, pliée en huit.Je lui donnerai pour titre: "Les Bonnes Soirées"". Le succès est immédiat grâce à une "campagne de promotion" avant la lettre ... qui en remontrerait à beaucoup d'éditeurs actuels! Car désormais Dupuis est le nom d'une maison d'édition. 1925. Création d'une revue humoristique: "Le Moustique". L'adjonction de programme de radio, peu après, va assurer la popularité de l'hebdomadaire. Rançon de la réussite: en 1936,René Matthews prend la responsabilité des premières publications flamandes, "De Haardviend" et "Humoradio".

Quant à Spirou, né le 21 avril 1938, il sera à la base de l'explosion internationale des Editions Dupuis. Les Bonnes Soirées, puis Bonnes soirées, Bonne soirée et enfin BS-Bonne Soirée: c'est un des titres de la presse féminine qu'on a presque honte à présenter tant il est entré dans notre vie. Essayez: dites "Bonne Soirée" en Belgique, en France, au Canada, en Afrique francophone, en Polynésie, à Madagascar. On vous comprendra, on saura de quoi vous parlez. Créée en 1922 par Jean Dupuis, "Bonne Soirée" fut d'abord un hebdomadaire publiant des romans à mettre entre toutes les mains. Au fil du temps, plusieurs rubriques sont venues s'ajouter à l'aspect romanesque et feuilletonesque. Aujourd'hui, BS est un magazine moderne, fidèle à sa tradition: détente, rubriques pratiques, actualité. Une vision féminine sur le monde moderne. Deuxième dans l'ordre chronologique des créations de Jean Dupuis, Télémoustique est aujourd'hui le premier hebdomadaire belge, champion toutes catégories.


Une couverture de Bonnes Soirées
illustrée par Franquin.

Que celui qui n'a jamais lu un numéro de Spirou ou de Robbedoes dans sa vie nous lance la première rotative! Depuis 1938, Spirou entraîne sa troupe de personnages dans le monde entier.Ils ont largement contribué à faire de la bande dessinée un neuvième art.
Aujourd'hui, grâce à l'impulsion donnée par Charles Dupuis, responsable éditorial des Editions Dupuis, Spirou et Robbedoes restent à la pointe de ce qui se fait de mieux en bandes dessinées.
Les adjectifs ne servent à rien pour définir l'aventure du journal de Spirou.
Qu'il suffise de vous dire que Sirou et Robbedoes, c'est Buck Danny, Lucky luke, Gaston, Boule et Bill, Gil Jourdan, Sophie, Les petits hommes, Tif et Tondu, les tuniques Bleues, Sammy, Le scrameustache, Johan et Pirlouit, Yoko Tsuno, Germain et nous, Jean Valhardy, L'Oncle Paul, Benoît Brisefer, Docteur Poche, Natacha, Bobo, Jess Long, Jeannnette Pointu, Bidouille et Violette, Isabelle, Marc Dacier, 421, La patrouille des Castors, Pauvre Lampil, L'Homme aux Phylactères, Sybylline, Vieux Nick, Ginger, Timour, Mic Mac Adam, Jerome K.Jérôme Bloche, Papyrus, poussy, Gully, Aurore et Ulyssse, Les baroudeurs sans frontières, Lloyd, Nic, Pierre Tombal, Godaill et Godasse, Les Krostons, Jerry Spring, La ribambelle, Le Vieux Bleu, Starter, Blondin et Cirage, L'Epervier bleu, Chaminou, Les Schtroumpfs, etc ...
Il y en a d'autres et, dans la liste ci-dessus, la seule répétition concerne l'etc.

On ne pourrait rêver plus wallon que "Spirou" ! Reportons-nous aux carnets de Jean Dupuis : "Le nom typiquement wallon de notre nouvel hebdomadaire reflète bien l'esprit du journal. C'est un enfant espiègle, primesautier, en bonne santé, farceur à l'occasion, mais qui a bon coeur : c'est un modèle, le Champion de la Belle Humeur !".
Toutes qualités qui ont séduits le monde entier, grâce aux albums .
Les éditions Dupuis et leurs sociétés soeurs en France et en Hollande vendent aujourd'hui 13 000 000 d'albums. Sans compter les traductions en italien, espagnol, allemand, anglais, suédois, finlandais, norbévégien, japonais, thaïlandais, portugais, catalan, breton, etc.
Véritable retour aux sources: certains de nos albums ont connu une traduction en wallon liégeois!
Les années '80 méritent , à juste titre, le label d'Age d'Or des Albums.
Rappelons que cette extraordinaire expansion trouve son origine dans la volonté de l'éditeur d'apporter une lecture distrayante aux enfants et aux nombreux artistes qui l'ont secondé de leur talent.
L'Ecole de Charleroi, créée par Joseph Gillain (Jigé), essaime dans tous les pays.

Mais n'oublions pas que, sans imprimerie et sans personnel, tout cela n'aurait jamais été possible.
TREIZE MILLIONS d'albums par an. Soixante millions de publications en une année, soit plus d'un million de TELEMOUSTIQUE, HUMO, BONNE SOIREE, SPIROU et ROBBEDOES par semaine: c'est la performance réalisée par le personnel des Editions Dupuis aux commandes des machines les plus modernes. Aussi bien les imposantes rotatives que la modeste machine à écrire du rédacteur!
Nous avions laissé l'histoire des Editions Dupuis à la création de Spirou (1938).
Pour mener de front toutes leurs activités, les Editions Dupuis devaient sans cesse s'équiper de nouvelles machines.
La première commande importante de Jean Dupuis fut une circulaire pour un marchand de semences, tirée à 100 000 exemplaires.

A l'époque, une presse arrivait difficilement à bout d'un tel travail.
Les rotatives ont remplacé les presses. Les procédés d'impression hélio et offset ont pris la place de la typo, procédé en relief qui survécut surtout pour l'impression de quotidiens, passés depuis à des techniques plus modernes.
La linotype ? Cet emblème des imprimeries d'autrefois a aussi disparu. On ne parle plus que de photocomposition.
Et déjà, dans cette technique, les générations se succèdent !

Déjà en 1928, à la demande de son père, Paul Dupuis installait un nouveau département aux Editions Dupuis: la photogravure du Hainaut.
La nécessité de publier de plus en plus de documents photographiques, donc de clichés, rendait cette création inéluctable. Les brocheuses, les rogneuses, les couseuses trouvèrent leurs place dans les ateliers Dupuis en perpétuelle expansion: Marcel Dupuis y contribua.
Aujourd'hui, notre département photo fait appel aux techniques dignes de la science-fiction! La sélection des photos fait appel à l'électronique, composante des scanners. Cette année, Dupuis inaugure la mise en page électronique - ce qui placera notre imprimerie en tête de son secteur en Belgique.
La gravure des cylindres est appelée à se moderniser d'ici peu.
La troisième génération de photocomposition est en place. Brochage et matériel d'impression, par leur développement, permettront l'éclosion de nouveaux titres, tant dans le domaine des albums que des magazines.
On comprendra dès lors que, pour maintenir le niveau d'indispensables investissements, il soit fait appel à des groupes financiers très puissants.

Très tôt, les Editions Dupuis ont débordé du domaine de l'édition pure.
Les personnages de bande dessinée représentaient un potentiel inégalable d'animations diverses.
Il y eut les jeux de plage qu'on voyait fleurir pendant les grandes vacances.
Des débutants les animaient.Et pas n'importe lesquels: Jean-Claude, Jean Nohain, Jean Richard, Guy Lux, pour ne citer que ceux dont la carrière a fait des étincelles par la suite.
Ces jeux passèrent la frontière belge: qui ne se souvient du fameux Cirque Spirou et du théâtre du Farfadet dont les marionnettes "vivaient" les aventures du journal de Spirou ?
Parallèlement, des essais de dessin animé étaient lancés. Un studio vit le jour à Anvers. Il s'appelait T.V.A. - TVA, pour Tévé Animation !
Par la suite, d'autres se servirent de cette appellation, malheureusement non contrôlée, à d'autres fins moins agréables ....

Le petit chat Musti, le petit Noël, Tip et Tap, Boul et Bill et les premiers schtroumpfs firent leur bientôt leur apparition au cinéma et, surtout, à la télévision.
La demande internationale était telle que les premiers studios d'animation ne purent plus suivre. Il fallait penser à la coproduction, à l'appel de nouveaux partenaires.
Une société soeur des Editions Dupuis, la S.E.P.P., reprit le flambeau et donna une impulsion décisive à l'audiovisuel en Belgique.
Consacrée d'abord à la vente des droits dérivés de la bande dessinée, la S.E.P.P. permit à nos personnages de débarquer aux Etats-Unis.
Et de quelle manière! Les schtroumpfs, ça vous dit quelque chose.
Droits dérivés? Il s'agît de toutes les applications commerciales des personnages: figurines, reproductions sur T-schirts, affiches, jouets, etc.
Après les schtroumpfs, la S.E.P.P. s'est occupé des dessins animés du Marsupilami, Yoko Tsuno, Shoe et bien d'autres.

imprimé aux Editions J.DUPUIS - MARCINELLE. (1984)


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