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Vécu N° 27 (Juillet 2001)
de Damien Perez

La lecture de ce numéro 27 du magazine Vécu constitue plus que jamais une incitation au voyage immobile. Mais quel dommage de toujours s’arrêter à la première porte d’embarquement. Que voulez-vous c’est la règle du jeu : le magazine des éditions Glénat est une redoutable brochure d’agence de voyages. Les interviews riches et confortables, les esquisses rares et variées vous donnent des envies de destinations dessinées. Et ajoutent finalement à la déception de ne jamais lire plus de 6 ou 7 pages des séries présentées. Embarquement différé à la sortie en albums. Mais d’ici là les 146 pages bourrées d’inédits et d’informations de première main devrait en occuper plus d’un. Et d’agréable manière.

Au sommaire, donc, de cette volumineuse publication, « les derniers jours de la Géhenne », série prévue en sept tomes et s’inscrivant dans une veine « réaliste-fantastique », menée par Ersel - que l’on connaît pour s’être par ailleurs illustré sur la reprise des « Pionniers du nouveau monde » série initiée par J.F. Charles - et Ruellan (alias Maryse Nouwens) déjà complice du dessinateur pour la série « Claymore ». « La Géhenne » c’est une ambiance. Une jeune femme, de nos jours, au hasard d’une visite dans une vieille librairie, tombe sous l’emprise des chevaliers Cathares, cette congrégation religieuse hérétique du XIIème siècle - empruntant à la fois au manichéisme ancien et au christianisme - et prônant une austérité qui contrastait alors avec l’opulence de l’église catholique. Le vieux libraire voit arriver avec inquiétude un homme au regard démoniaque. Il fait partir précipitamment la jeune femme avec une pile d’ouvrages précieux consacrés aux Cathares. Rien de plus pour l’instant, si ce n’est que l’on nous annonce déjà un voyage dans le temps sur fond d’occultisme et l’amour dramatique de deux anges qui pour s’être aimés condamnent le monde à l’obscurantisme. De quoi faire saliver l’imaginaire.

Moyen-Age encore – toujours au XII ème siècle – pour une intrigue « de chair et de sang » sous la plume de JC Kraehn (« Gilles St André », « Tramp »). Cet auteur complet, tour à tour dessinateur et scénariste voire les deux à la fois, aurait pu céder à la facilité de reprendre « Les aigles décapités » série médiévale confiée depuis à Michel Pierret. Mais Kraehn avoue son envie d’abandonner cet univers historique « un peu « hollywoodien » » pour « montrer un univers rugueux, réaliste ». Et un héros pas très sympathique et grossier, « Le ruistre », chevalier mal rasé traître et vénal. Ici donc, pas de langage sucré ni d’amours galantes mais des jurons bien sentis et des fornications grasses qui sentent fort. Une autre idée du Moyen-Age. Du vécu quoi.

Dans un tout autre registre – celui de la science fiction post-apocalyptique – Michel Houot propose avec « Septentryon » une réflexion sur l’avenir des « grandes inquiétudes de notre société » comme le clonage. Des idées auxquelles il réfléchit depuis 20 ans et que sa « maturation très lente » ordonne enfin en album pour une série se réclamant à la fois de « Matrix », « Megalex » ou « Blade Runner ». Le tout porté par un dessin classique mais convaincant. 2070 : un septième de la planète est contaminé. C’est Antéden, « cimetière d’épaves et nid à virus » mais également le réceptacle d’une nouvelle société que va découvrir Chronover, un banni de la cité des hommes devenus fous. Un concept ambitieux que l’auteur espère mener à son terme en évitant les poncifs d’un genre déjà très largement visité au cinéma, en BD ou en littérature.

Avec également « les châtiments de l’an Mil », chroniques d ‘un jeune homme maudit par l’Eglise car né vairon – un œil bleu et un œil marron – sur fond d’apocalypse annoncée (une série réalisée par Bertrand Marchal et Toldac, collaborateur de Maltaite, Will et Makio dont il est d’ailleurs le frère), la présentation d’« Ombres » (Dufaux-Rollin), une interview du prolifique Dieter (« Julien Boisvert », « Typhaon », « M. Khol ») pour la suite de « 6 jours et mourir » (avec Nicaise), polar malin et surprenant, les premières pages du tome 13 de la grande histoire illustrée de la mafia, « De silence et de sang » (Corteggiani, Barison), quelques belles images tirées d’un futur recueil d’illustrations de JF Charles (« Fox ») à paraître chez Glénat, relatant « l’histoire d’un dessinateur qui, lassé de travailler en noir et blanc, fait une incursion dans le domaine de la couleur directe » et enfin la publication intégrale en noir et blanc du tome quatre de « Docteur Monge » (Bardet et Chabert). De quoi bronzer avec la marque des pages.

Vécu - Glénat Presse - 55, boulevard des Alpes à 38240 Meylan - France - Tel : + 33 4 76 90 97 10 / Belgique : Editions Soumillion - avenue Van Kalkenlaan, 9 à 1070 Bruxelles


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