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Vécu N° 28 (Octobre - Décembre 2001)
de Damien Perez

Un Vécu sombre et gothique à souhait puisqu’il s’ouvre sur une large tribune offerte à Kergan le vampire, le « Prince de la nuit » (5 tomes parus chez Glénat) par la bouche de son créateur Yves Swolfs (Dampierre, Durango). Très étonnante interview où l’on apprend que l’auteur a pour ambition de mener par-delà les aventures de l’immortel Kergan persécutant au fil des générations la famille Rougemond une réflexion sur la marche du monde. Ce sixième et dernier tome ne prend donc pas place pour rien dans les années 30, en Allemagne, théâtre de l’émergence du nazisme. Swolf effectue un rapprochement entre cette période troublée et la notre, période qui « illustre parfaitement les dangers et les risques que nous encourons si nous persistons dans nos erreurs ». A noter également que le « Prince de la nuit » découle d’une « démarche personnelle […] entreprise dans le domaine de la psychanalyse » afin de permettre à l’auteur d’aborder des problèmes le concernant au premier plan, « le Bien, le Mal, le sentiment de culpabilité, la filiation, la présence ou l’absence d’amour maternel » et auxquels il a voulu « donner une dimension universelle ». Diantre. Ce ton-là, mine de rien donne envie de relire la série, pour ma part simplement parce que je n’y avais discerné aucune profondeur particulière. Car même si elle reste très plaisante, « Le prince de la nuit » fonctionne essentiellement sur tout les poncifs et ressorts de la littérature vampirique sans véritable innovation. La construction du récit qui prend toujours appui sur deux époques à la fois – celle d’un ancêtre Rougemond et celle du dernier de la lignée tous deux aux prises avec Kergan l’immortel – sauve à mon sens le tout qui sans cela ne serait qu’une variation efficace sur un thème souvent visité. Cet album devrait clore le cycle principal, sans qu’il soit exclu que les personnages reviennent dans le cadre d’albums traitant de « toute une série de sujets annexes » voire d’ « une projection sociologique un peu délirante » dans le futur. Son dénouement quoi qu’il en soit est annoncé comme inattendu, ce qui selon le profil du lecteur, avivera son appétit ou le plongera dans une profonde angoisse…

Beaucoup moins méditative mais non moins intéressante la présentation de « Tosca », très très bel exercice de promotion intelligente, et je le dis sans ironie. Tosca, c’est l’histoire d’un jeune américain ivre de vengeance, condamné à la peine capitale pour le meurtre des deux dealers responsables du décès de son frère. La DEA (Drug Enforcement Agency, la brigade anti-drogue américaine) lui propose un deal : terminer ses jours dans le couloir de la mort ou infiltrer la Mafia sous l’identité de Tosca – membre éloigné de la famille d’un mafieux influent - ce qui ne vaux peut-être guère mieux… Stephen Desberg (« IRS », « La vache ») en scénariste avisé aurait pu se contenter d’offrir quelques pistes au lecteurs, pistes qui ne les aurait menés qu’à la lecture forcément décevante d’un album d’introduction aux suivants - c’est là un problème propre à la majeure partie des séries qui pour avoir une intrigue étoffée nécessitent une longue mise en place – mais l’auteur semble avoir trouvé la parade en offrant non pas quelques clés mais tout le trousseau. Chacun des personnages est passé au crible, son profil psychologique extrêmement commenté, certains revirements sont déjà annoncés alors même qu’ils n’interviendront peut-être pas dans ce premier tome, et comble de la malice, Desberg revendique l’influence de Tarantino, de Coppola, devançant ainsi toute critique plutôt que d’avoir à se justifier après coup. Tout cela donne à l’arrivée une interview foisonnante, très plaisante et riche. Et bien agréablement illustrée de la main de Valles (« Les maîtres de l’orge »).

Avec la présentation du quatrième tome de « Bleu lézard » (Roëls), une double interview d’Hermann et fils ou d’Yves H et père (pour ne froisser personne) à l’occasion de la sortie de « Rodrigo », le nouveau Bois Maury, la suite des aventures du jeune « Louis Ferchot », véritable parcours initiatique jusqu’à l’incontournable cycle de ses aventures adultes et anarchistes : « Louis la guigne », Le nouveau « Chevalier Walder » (tome 5 « Trois de cœur » par Jeanine Rahir), « Histoires d’en ville » tome 2 par Berlion et la publication complète en noir et blanc du « Lys noir » par Goepfert.


Vécu - Glénat Presse - 55, boulevard des Alpes à 38240 Meylan - France - Tel : + 33 4 76 90 97 10 / Belgique : Editions Soumillion - avenue Van Kalkenlaan, 9 à 1070 Bruxelles


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