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Bo Doï N° 56 (Octobre 2002)
de Damien Perez

Si la couverture de votre Bo Doï tout neuf vous semble gondolée, c'est que vous êtes particulièrement sensible au talent qu'a Fred Beltran pour dépasser la simple structure moléculaire du papier et rendre tangible les rondeurs énormes de ses héroïnes. On le sait, Beltran est un auteur à part dans le monde de la bande dessinée, véritable prophète du tout-informatique, dont la série " Megalex " (sur un scénario de Jodorowsky) constitue la bible. Il convient toutefois de rappeler, et Bo Doï le fait fort bien, que derrière le moniteur et les crépitements de clavier se dissimule un authentique dessinateur. Le crayon, Beltran connaît. Architecte de formation ( il a appris en même temps que son père, formé sur le tard !), l'homme navigue d’abord, comme bon nombre de confrères, entre travaux alimentaires et friandises méconnues… jusqu'à ce que l'ordinateur ne lui ouvre les portes de l'Empire manga - avec " Nina ", une sorte " d'Hélène et les garçons " déshabillé - puis celles de l'antre de Jodorowsky, qui finira par lui confier un scénario, " Megamex ", élaboré à l'origine pour Otomo, l'auteur d'Akira. De quoi boucler de belle manière une drôle de boucle. Outre cette interview permettant de recadrer le débat et de mieux cerner Beltran, même si le dessinateur a manifestement pris soin de ne laisser traîner aucune photo de lui entre les mains des journalistes, on découvrira une très intéressante leçon de fabrication de ses personnages en 3D. Où l'on apprendra, et ce n'est pas rien, que les armures des guerriers de Megalex viennent d'un passage par le scanner d'une pauvre langouste, que Beltran, content du résultat, a dévoré " pour fêter ça ". La création prend parfois des chemins déroutants.

Tout aussi déroutant, l'aveu de Zep, qui comme l'annonce la couverture, assume le plagiat de quelques gags de la série " Germain et nous ", par Jannin. Bof, après tout pourquoi pas, puisque les deux auteurs, que Bo Doï interviewe conjointement, font preuve d'assez de respect l'un pour l'autre pour que le problème n'en soit pas un, préférant converser avec élégance, inspiration parfois, du statut d'auteur. L'occasion en tout cas de redécouvrir " Germain ", gentil pamphlet social des années 70, baromètre de l'humeur des foules qui finalement nous renseigne sur le quotidien d'une époque devenue kitsch et mythique. Qui sait si dans trente ans, on ne considérera pas ainsi Zep ? A noter l'annonce, avant de courir chez le bouquiniste le plus proche, que Les éditions du Lombard ressortiront en Intégrale (quatre volumes prévu) les aventures de Germain et les siens.

Avec bien sûr beaucoup de bande dessinée, le début des "Eternels ", par Meynet et Yann, le suite de " La maison Dieu " second volume, par Berr et Rodolphe et la conclusion de " Manhattan beach 1957 ", par Hermann et Yves H. Et puis beaucoup d'invités : Giardino pour la sortie du nouveau " Max Friedman " (" Rio de sangre "), Peeters pour sa biographie d'Hergé (" Hergé fils de Tintin "), et Margerin pour " Un enfoiré et quelques connards ". Parmi ces présences de choix, une absence. Celle de Yann Moix, qui maintenant qu'il a critiqué l'album - décevant - de son ami Beigbeder, s'en repart vers d'autres horizons. " On a du se tromper de Corto " précise Jean-Marc Vidal dans son édito. Les amateurs apprécieront ce joli trait d'esprit. Les autres qui ont déjà oublié Moix s'en moqueront comme de leur première houppette. Pourquoi s'obstiner ? Décidément littérature élitiste et bande dessinée populaire n'auront vraiment jamais grand chose à se dire. Et alors ?

Bo Doï - 13, rue de l'Ancienne Comédie à 75006 Paris - France - Tel : + 33 1 44 41 00 58 - e-mail : lz.bd@wanadoo.fr / Belgique : BoDoï - Partner Press - 11, rue CH. Parenté à 1070 Bruxelles


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