Que les mordus de Goscinny ne fassent pas d’esclandre si d’aventure leur marchand de journaux se trouvait en rupture de Bo Doï, car vraiment le dossier Goscinny, annoncé par une épatante illustration signée Albert Uderzo, surprendra surtout par sa brièveté. Au programme – en à peine 6 pages – une interview, mordante il est vrai, de Marie-Ange Guillaume, collaboratrice attitrée de Goscinny version rédacteur-en-chef de Pilote ainsi qu’un florilège de textes inédits tirés d’un ouvrage à paraître, « L’album Goscinny », par Phil Casoar et Jean-Pierre Mercier. Bref c’est un peu court, d’autant que le discours de Marie-Ange Guillaume pouvait faire penser que Bo Doï décrypterait plus longuement la personnalité attachante mais complexe du scénariste d’Asterix et Lucky Luke. On s’intéressera toutefois avec plaisir à quelques intrigues de bureau relatées ici, à la relecture de la « fronde » organisée par Gotlib, Mandryka et consorts, lorsque Pilote, trop prude, accoucha involontairement de « L’écho des savanes », et puis quelques anecdotes parfois savoureuses, mais courtes, vraiment trop courtes.

Bien plus abouti, l’interview de Jacques Ferrandez, interrogé à l’occasion de la sortie du nouveau « Carnets d’Orient », « La guerre fantôme ». Où l’on découvre un beau parcours, celui d’un homme né à Alger, et qui commence par dresser sur cinq albums quelques portraits épars sur fond d’histoire algérienne… avant de se rendre compte qu’il racontait l’Histoire, la vraie, celle des autres et puis la sienne aussi, qui devait fatalement déboucher sur l’adaptation d’un épisode forcément polémique, celui des « événements d’Algérie », entre FLN et OAS. A lire par plaisir, bien sûr, mais aussi pour se faire une idée de ce peut être un parcours artistique, où la production d’un média de divertissement fait office de parcours initiatique, de devoir de mémoire et d’investigation historique.

Et puis loin de la grande Histoire une toute petite : le forum s’en est fait l’écho, la vente aux enchères dite « de Jean-Baptiste », du nom de cet ex-bédéphile faisant commerce de quelques 650 albums dédicacés, énerva beaucoup, à tel point que quelques auteurs – Segur et Trondheim - s’employèrent à ruiner la vente, sise à Neuilly le 23 septembre dernier. Avouons-le, on s’attendait à ce que Bo Doï apprécie l’initiative des trublions. Eh bien non. Sous la plume de Philippe Audoin, il semble que la polémique motive finalement très peu le mensuel, qui se contente de rapporter les faits, ainsi que le cadre législatif de l’affaire, avec humour, avant de conclure cyniquement qu’en « BD comme ailleurs, le client est roi… ». C’est pas si bête.

Avec bien sûr des prépublications à foison : le premier épisode du « Bal de la sueur » 3, par Cromwell, Riff Reb’s, Ralph et Ruffner, la seconde tranche des « Immortels », par Meynet et Yann, et la fin de « La Maison Dieu », par Berr et Rodolphe.