L'actualit� de la presse BD comment�e



Bo Doï N° 63 (Mai 2003)
de Damien Perez

Allez, une bonne nouvelle pour Pavillon Rouge : à défaut d’une ligne édito inattaquable, le mensuel le plus chahuté du PPBD* possède au moins une identité visuelle assez forte pour qu’on crie au plagiat lorsqu’un concurrent truste en couverture une star Delcourt.

Rien à faire. Avec Navïs en « Une », Bo Doi ressemble à Pavillon Rouge, et avait donc tout intérêt à ne pas laisser la Belle trop masquer son logo. D’autant que la dite illustration – un agrandissement de l’affiche de Paris BD, LE festival qui veux devenir Festival à la place du Festival – est suffisamment indigeste pour que l’on ne s’y attarde pas (sur le top ten des couvertures loupées, elle talonne sec un Thorgal de sinistre mémoire).

Heureusement, passée la première page, on respire. Et l’on se voit obligé d’en rajouter une couche sur le Pavillon, au risque de le froisser. Explication : Jean-David Morvan est l’invité de Bo Doï. Oui oui Morvan, de chez Delcourt. Que l’on compare le dernier Pavillon Rouge spécial Sillage (n° 18) et les six maigres pages de ce dossier. D’un coté des inédits à la pelle, des prépublications pas négligeables ainsi qu’un chassé croisé entre Morvan et Buchet. Sympa, marrant mais finalement peu de fond, au profit de la forme. Ici c’est exactement l’inverse : une mise en page dont on connaît les limites, des illus pas franchement inédites, sans parler d’un Jean-Pierre Fueri dont les questions n’ont rien de transcendantes.

Eh bien justement. Tout l’art de l’interviewer se pose là. Allumer une petite flamme chez l’interviewé, l’entretenir gentiment jusqu’à ce qu’une vrai thématique se dégage de l’entretien. Ici on parle de la guerre, dont les coups d’éclats, les déflagrations, éclairent d’une lumière trouble toute l’œuvre de Morvan, au moins aussi obsédé que Tardi par les chocs d’armées, mais plus roublard et polémique dans son analyse. Bref voilà du vrai boulot de journaliste, qui fera réfléchir le lecteur, et lui donnera éventuellement quelques clés pour dépasser la simple dimension ludique de Sillage ou HK. Je n’aimerais pas donner l’impression de m’acharner. Mais quels impératifs pourraient empêcher l’équipe de Pavillon Rouge de se livrer à se genre d’analyse plutôt qu’à leur rhétorique un peu mode et chalande ? Rien.

Mais revenons à Bo Doi, qui outre cette agréable entretien avec Morvan – préambule à la publication en épisodes du nouveau « Sillage », comment diable ont-il piqué cette exclu à PR ? – ouvre ses pages à Caza, à l’occasion de la future sortie (le 25 juin) d’un long métrage d’animation, « Les enfants de la pluie ». Rien à dire de cette interview menée par Lise Benkemoun, mais tout à lire, puisque sa culture cazanière y fait merveille. Il faut dire que l’interviewé se fait suffisamment rare pour qu’on ait jamais l’impression de redite dans ses propos, ce qui toujours agréable.

Coté prépublication, on n’est pas à plaindre, avec la fin de « Chimères » (Béhé et Mosdi), la suite de « Neptune » (par Delitte) et le début de « Légende » par Swolfs, gros projet mené chez Soleil. Autant dire que les fans du « Prince de la nuit » ont du souci à se faire…

Et puis en guise de gâterie, le courrier des lecteurs, dont on ne parle pas assez, d’autant que les auteurs incriminés dans les courriers reçus à la rédaction s’offrent ici un droit de réponse. Séquence la plus remarquable de la rubrique, un billet signé Yann, sans doute le plus bel exercice de langue de bois qu’il m’ait été donné de lire. Recadrons le problème : lors de la prépublication dans Bo Doï des « Immortels » (Yann et Meynet), le premier épisode s’ouvrait sur une scène de porno, que regardait à la télé un musculeux quelconque. Version Dargaud, en album donc, le dit musculeux regarde toujours la télé. Mais plus de blonde en cuir à l’écran. Juste un nain en bonnet. Puisque l’homme regarde cette fois… Blanche Neige. Alors censure ou pas ? On a vraiment envie d’en rire, mais la réponse de Yann, bel exercice de surenchère dans la provoc facile, ne convaincra personne, tant on reste sur sa faim. On a beaucoup glosé sur la censure et la bande dessinée. Un chapitre resterait-il à écrire ? On se renseigne et on en reparle.

*PPBD : Paysage Presse BD

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