" L'histoire, c'est aussi l'aventure ". Jamais maxime n'aura sonné aussi juste que celle du magazine des éditions Glénat, dont les présentations d'albums complétées d'interviews réputées font le renom de cette publication toujours riche d'ambiances historiques et de destins fabuleux.

Ce premier numéro de l'année vous conviera d'abord à une promenade sur " Les chemins croche ", le tome 13 des " Pionniers du nouveau monde ", saga humaine et réaliste dont le seul héros récurrent reste avant tout l'Amérique, terre d'aventures et d'espoirs. Jean-François Charles, accompagné de sa femme Maryse au scénario, et Ersel (qui a repris le dessin en 1994, après Jean-François Charles) jalonnent en interviews le parcours d'une série dont l'un des mérites est d'emprunter les chemins inexplorés, à mille lieux des poncifs de l'imagerie populaire amplement utilisée dans d'autres productions bien moins passionnantes, d'une grande, très grande aventure historique où rien n'était acquis. D'ailleurs les auteurs sont affirmatifs : " On peut toujours tuer un de nos personnages, n'importe lequel, et la série continuera. C'est aussi un avertissement au lecteur ". Vous voilà prévenus.

Quand Thomas Mosdi et Frédéric Bihel planchent sur un nouvel univers, on peut légitimement s'attendre à du neuf. Bien loin des ambiances égyptiennes des derniers tomes des héritiers du Soleil (série initialement réalisée par Didier Convard) la création de l'archipel de Malienda fut manifestement l'occasion pour les deux auteurs, rejoints par Xavier Josset, de s'aérer pour nous convier à la visite d'un " ailleurs semblable à celui des rêveries et des contes ". Basé sur un scénario de jeux de rôles rédigé par Mosdi, rigoureux et pointu dans ses personnages comme dans sa géographie imaginaires, ce premier tome nous entraîne dans un labyrinthe maritime au gré des luttes obscures d'un jeune chevalier de la confrérie d'Harad, Mori Dunnon, chargé de pourfendre le mal sous toutes ses formes (Y'aura du boulot. La série est heureusement prévue en cinq albums). Un concept ambitieux, qui n'est "ni du Mosdi, ni du Bihel ni du Josset mais une fusion qui a son unité et son existence propres ". Gageons toutefois qu'avec ces trois-là à la barre, la croisière ne s'amusera pas tous les jours. Du courage, Chevalier !

" Le vent des Dieux " (Cothias, Gioux) nous entraîne pour sa part vers la fin d'un cycle, ou même de la série, qui sait ? Thierry Gioux, quoiqu'il en soit, réalise ici ses dernières planches, jugeant qu'il a cette fois " fait le tour de la question " après quelques tomes qu'il considérait comme " du mauvais boulot " mais qui lui avaient donné l'envie de se " rattraper [pour] donner une fin convenable ". Un foisonnement toujours aussi riche de l'intrigue, une précision implacable dans le dessin donnent au titre de cet album, " Les paradis perdus ", comme un petit goût de regrets. A moins que…

Présentation en famille de " Res Punica ", nouvelle série à quatre mains, en l'occurrence celles des Cosset père et fils, Jean-Marc (scénariste) et Sébastien (dessinateur), sur laquelle plane l'ombre érudite de Didier Convard, " ami de longue date ", à l'origine de la vocation de Sébastien. On ne s'étonnera guère donc de trouver ici une intrigue intelligente, qui se plaît à jouer avec l'histoire et notre perception du présent. Et si Carthage l'avait emporté sur Rome ? Qu'en serait-il de notre quotidien ? Telle est l'écheveau de la dimension parallèle que les auteurs nous proposent de déméler pour notre plus grand plaisir. Une accroche admirablement bien ficelée, un trait riche d'ambiances et de couleurs servi par une histoire plus que prometteuse. A découvrir en albums dès que possible. Enfin, moi c'est ce que je ferai.

Promenade en roue libre dans le sillage de deux nouveaux auteurs, Goran Skrobonja (scénariste) et Drazen Kovacecic (dessinateur), heureux lauréats d'un concours organisé par Glénat en 1999 et récompensés par la future présentation de leur projet commun, " La roue ", à l'occasion du festival d'Angoulème. Ce premier tome, (" La prophétie de Korot ") nous entraînera sur les chemins de traverse d'une intrigue bercée entre ambiance médiévale et futur deshumanisé. Année 2098 (vous marrez pas, on y sera vite), Alfred Chester, assassin de son épouse volage vient d'être condamné à la " roue ", ultime raffinement technologique d'une société malade, qui, permettant de dissocier l'âme du corps, exile en pénitence l'esprit des criminels vers un dimension parallèle. Chester s'en ira donc purger sa peine en plein Moyen-Age, hôte impromptu réincarné dans un corps de… princesse, et dont la dame de compagnie possède certains arguments propres à vous rendre ce genre de captivité absolument insupportable. Rien à dire, dans ces conditions, l'amour c'est le bagne. Seul accroc dans cette présentation, les quelques pages publiées se cantonnent à la pâleur glacée de l'intrigue futuriste que l'on aurait aimé pouvoir comparer aux couleurs plus ambrées des latitudes médiévales, et que Drazen Kovacecic juge, excusez du peu, " somptueuses ". En bref, tout ça laisse un peu sur sa faim. Ce serait voulu ? Nooon ?

Et pour terminer, une sélection de planches inédites des auteurs des prochains tomes du " Décalogue ", grande fresque historique initiée par Frank Giroud, dont vous pouvez retrouver le premier tome en prépublication dans les derniers numéros de Bo Doï et une présentation complète sur notre rubrique " Décalogue ", le tome 7 des Mémoires de Cendres (" Calimala " ) par Jarbinet, dont le trait élégant et les décors fouillés conviennent parfaitement à la publication intégrale en noir et blanc habituelle, ainsi que des informations diverses et variées sur le monde de la bande dessinée en règle générale.