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Lanfeust Mag N° 29 (Janvier 2001)
de Damien Perez

Lanfeust Mag négocie avec brio le dangereux virage de l'après Lanfeust en nous régalant d'un lâcher de nouvelles séries dont la moindre n'est pas Zorn et Dirna , grande fresque décalée d'un univers médiéval d'où la mort s'en est allée, à jamais prisonnière d'un grand psyché magique. Concrétisation ultime des aspirations humaines les plus secrètes autant qu'élimination de notre peur la plus fondamentale ? Que nenni, car si l'âme est immortelle, le corps, lui, poursuit sa décrépitude au gré des assauts du temps. D'où la création des Laminoirs, mouroirs d'état censés réguler la population et bannir les âmes solitaires vers le réceptacle des corps des bourreaux ou s'entremêlent des centaines de personnalités aux aspérités parfois contrastées. Zorn et Dirna, quant à eux, n'aspireraient qu'au bonheur de leur jeunesse paisible dans la montagne, laissant le monde dans l'ignorance de leur pouvoir redoutable, mais voilà : les jeunes jumeaux peuvent donner la mort en appliquant les mains sur une créature vivante. Leur mentor, Erken, décide au jour de la première manifestation de leur pouvoir, d'emmener frère et sœur vers le vaste monde, vers un destin inconnu. Cette nouvelle série imaginée par Jean-David Morvan (Sir Pyle, Sillage, Troll) s'inscrit dans la droite lignée des ses précédentes productions, non par le thème abordé, mais bien par le soin apporté à la mise en place de l'intrigue, solide et soignée. Les premier épisode de cette saga dessinée par Bessadi et Trannoy devrait constituer, si la qualité suit (et pourquoi n'en serait-il pas ainsi ?), une des série-phare du magazine des éditions Soleil.
Les forêts d'Opale (Arleston, Pellet), pour leur part, résonnent toujours des rumeurs de la quête de Darko vers le mystérieux Grimoire de Cohars, rumeurs de rétablissement cette fois, puisque l'enfant de la prophétie, que l'on avait laissé bien mal en point à l'épisode précédent, retrouve une vigueur nouvelle sous les incantations un rien contraintes d'un prêtre de la Lueur. De quoi nous emmener vers de nouvelles péripéties toujours plus remuantes.
Le chant d'Excalibur entame un nouveau couplet sur les traces familières de Merlin (" vieux bouc aviné " bien loin du magicien des légendes arthuriennes), toujours prisonnier de l'infâme évêque Mordred, avec aux trousses celle dont il espère qu'elle le tirera de ce mauvais pas sans fausse note, la jeune Gwynned, détentrice de la célèbre Excalibur. Le tout comme d'habitude sous le haut patronage d'Arleston l'enchanteur et d'Hübsch l'enlumineur .
Latil et Van Liemt nous entraîne sur les chemins d'une historiette qui vous fera sans doute relativiser certains grands mythes propres à l'Héroic Fantasy (Les territoires sacrées, les légendes centenaires, la quête initiatique de l'Elfe au sens de l'honneur aussi pointu que ses oreilles), sur les terres de " No mannes land " où le héros n'est jamais celui que l'on croit ni la fin ce qu'elle devrait être. Une boutade qui tourne à l'auto-dérision quant on sait que ces mêmes poncifs se retrouvent parfois mis en scène de manière tout à fait sérieuse dans d'autres séries du même éditeur. Une sorte d'entracte en somme.
Loin de " No mannes land ", Parnotte et Mallié nous replongent dans l'univers sub-aquatique des Aquanautes (T2, Containers), en quête de réponses aux nombreuses questions posées par le tome 1. L'occasion de retrouver les ambiances confinées de la station scientifique Physalia, immergée dans l'Atlantique Nord, où géologues et militaires cohabitent plus que difficilement dans une ambiance lourde du souvenir d'un meurtre qui selon toute logique, ne peut avoir eu lieu. Le chercheur Nando se perdra t-il à vouloir trouver la vérité ? On ne lui souhaite pas même si, pour l'intérêt de la série, on lui souhaite finalement bien du malheur.
Travail manuel ou lecture horizontale ? Tel est le choix cornélien qui s'offrira aux lecteurs à la découverte du comix du mois, " Nocturnes rouges " (Nhieu), prépublié en fascicule au milieu des rubriques habituelles qui retrouvent tout leur espace après le départ en fanfare de l'emblématique Lanfeust de Troy le mois dernier, ce qui laisse un peu de temps à Arleston (encore qu'il soit manifestement bien occupé au vu du sommaire de ce numéro 29) pour rédiger un édito qui enfonce le clou de la polémique au sujet de l'augmentation des tarifs d'entrée pour le festival d'Angoulème. L'occasion pour le scénariste prolixe de commenter, une fois n'est pas coutume, un univers impitoyable mais bougrement réel, l'occasion de souhaiter avant que ne s'ouvre cette grande réunion annuelle des bédéphiles de tous poils (trolls et autres) que le festival " redevienne ce qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être : une grande fête ".

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