Puisque la Bande dessinée est un art (le neuvième en l’occurrence) elle méritait bien son panthéon, que construit volume après volume, comme autant de briques consacrées à ce bel édifice, l'équipe des DBD (Dossiers de le Bande Dessinée). Pascal Roman tourne en compagnie de Didier Chrispeels dit Crisse (L'épée de cristal, Kookaburra, Atalante) les pages d’une vie éditoriale bien remplie sur quatre périodes clefs : "les années foot, Spirou et Tintin", années d'apprentissages et de digestion de certaines influences (telle celle de Dany), "les années Vents d'Ouest" émaillées de succès mais aussi de désillusions, "les années Soleil" ou la plénitude d'un artiste en parfaite harmonie avec son éditeur et "les années futures", pour ne pas oublier que Crisse, véritable horloger de l'intrigue, qui conçoit ses textes comme un dialogue avec ses lecteurs, nous garde sans doute quelques surprises dans ses cartons.

De surprises, cet entretien n'en manque pas, puisque l'on y apprend, entre autres, que les femmes de Crisse profitent d'une "jolie plastique parce qu'[il] ne [sait] pas les dessiner autrement" et qu'il ne travaille jamais sans un album de Vatine à portée de la main, "l'auteur qui a trouvé des solutions graphiques à presque tout" et avec lequel il rêverait de co-signer un album. Une mention spéciale pour les "Années Soleil" ou Crisse dépeint tout son attachement à son nouvel éditeur, Farid Boudejellal, le voyage clandestin de Kookabura jusqu'à Angoulême par camion frigorifique pour contourner la législation routière très restrictive des Week-end et la mise en route du projet « Atalante » dont le sort fut joué… à Pile ou Face. Pascal Roman, par ailleurs scénariste de « Double M » (dessin de Meynet) a l’intelligence de lancer plus de pistes de réflexion que de questions convenues, permettant ainsi au dessinateur-scénariste de se livrer à une véritable introspection rétrospective plus qu'à l'exercice calibré qu'est parfois l’interview.

Et puisque Crisse n'oublie pas ses amis, Mitric, futur illustrateur d'une série annexe à Kookaburra, qui narrera la jeunesse de Dragan Preko le space sniper et Gaudin (dessinateur de Marlysa) sont invités par le maître à clore ce dossier n°9.

Disponible en version dossier seul ou couplé à une partie magazine, le DBD version presse se fait quant à lui le reflet de l'actualité du monde de la BD et propose un interview de la comédienne Michelle Bernier, qui endosse toujours au théâtre les habits de papier des personnages du démon de Midi de Florence Cestac, un entretien avec Hervé Desinge, M. Echo des Savanes, pour une bonne leçon de journalisme, une présentation du Golden Creek Studio, marchand de rêve sous forme d'affiches prestigieuses signées des plus grands noms et aquarellées une à une. Le tout complété par un reportage photo chez Derib (Yakari, Buddy Longway, No limits), dans ce petit bureau d'où naissent les grand espaces propres à ce maître du western, et toutes une série d'informations amplement illustrées et à la présentation tout aussi soignée qui font des DBD autant un bel objet qu'une mine d'informations.