Les 1231 critiques de Thierry Bellefroid sur Bd Paradisio...

Western par Thierry Bellefroid
« Western » par Jean Van Hamme et Grzegorz Rosinski. Dans la collection « Signé » des éditions du Lombard.

Comme pour chaque album de Van Hamme, désormais, il y aura les pour et les contre, les enthousiastes immodérés et les déçus chroniques. Plus encore sans doute dans les « one shot » que dans les albums de ses séries (« XIII » mis à part), Van Hamme déchaîne les passions et les polémiques. Pourtant, avec sa maîtrise sans pareille du scénario, il continue de s'illustrer dans ces one shot mieux que n'importe où ailleurs. Ce « Western » en est la preuve. Le scénario est une machine, une machine de guerre pourrait-on dire. Elle va se refermer sur les héros et tout broyer sur son passage. Comme dans la tragédie antique, on sait que le destin est le véritable et peut-être même le seul héros de l'histoire. On sait que les personnages n'ont pas les moyens de lui résister, que les fils sont déjà noués. C'est le cas dans Western. Dès la deuxième page, Jean Van Hamme nous aide à nous faire à cette idée en installant un récitatif dans lequel le personnage central de l'histoire (que l'on n'identifiera que plus tard) évoque les caprices du hasard (« Ce que Jess n'avait pas prévu, c'est que Van Deer ne serait pas seul »). Le jeune Nate va donc se laisser mener par le destin et sa fin sera tragique, on s'en doute très vite. Pourtant , ce récit n'a rien de mathématique. Jean Van Hamme l'a construit à sa manière, c'est-à-dire avec intelligence, s'appuyant autant que possible sur des éléments réels sans jamais leur donner plus d'importance qu'ils ne doivent en avoir. Résultat : au bout de quelques pages, le personnage de Nate et son univers existent bel et bien. Ils sont crédibles. Et le lecteur, lui, est ferré. Il ne refermera l'album qu'au terme d'une lecture soutenue par un suspense savamment entretenu. Bien sûr, comme dans la tragédie antique ou dans certains récits policiers, on pourrait dire que le destin en remet un peu, que les personnages qui ont des comptes en suspend se retrouvent toujours. A la manière de ces pièces de théâtre de Feydeau où le mari, l'amant, la femme et les enfants naturels qui s'ignorent arrivent toujours à se retrouver dans le même lieu. Mais lorsqu'il s'agit justement de montrer la main-mise du destin sur les personnages, lorsque c'est bel et bien cette mécanique qui est le coeur du récit, où est le mal ? Western est un hymne à l'Ouest hollywoodien autant qu'à Antigone, si l'on peut caricaturer à l'extrême. Ce grand écart permet à Jean Van Hamme et à Rosinski de jouer sur les ambiances autant que sur les personnages et de construire un suspense dans un décor épique. Les doubles pages hors-texte de Rosinski viennent d'ailleurs renforcer cette impression tout en permettant au dessinateur de laisser libre cours à sa passion pour la peinture (de la même manière que Rudi Miel avait prévu de laisser de tels espaces à Will dans « L'arbre des deux printemps » paru lui aussi dans la collection « Signé »). Bref, Western mérite bien son nom et prouve que ces deux « monuments » de la BD ont d'abord pensé à se faire plaisir et à réaliser un rêve de gosse. Rosinski, peut-être plus encore que Jean Van Hamme, puisqu'il s'est lancé dans l'album en remettant totalement son dessin en cause. L'expérience était risquée. Le dessinateur de Thorgal a changé sa palette autant que sa technique. Le résultat est à la hauteur et ne ressemble à aucune des deux séries qu'il dessine par ailleurs. A soixante ans, cet album en couleurs directes est une véritable bouffée d'oxygène dans sa production.
« Les évadés de Kanash » tome 1 de la série « La cicatrice du souvenir », par Ange et Paty. Chez Soleil Production.

Et une nouvelle série, une. Le rythme ne faiblit décidément pas chez Soleil. Avec des ingrédients presque immuables, au premier rang desquels on retrouve la quête. Cette fois, c'est l'héritier dépossédé d'un royaume qui se met en tête de laver son honneur et de venger l'injustice qu'il a subi. Le prince Erkor a en effet été condamné par son oncle à mourir dans une vallée prison (où l'espérance de vie des condamnés ne dépasse guère la demi journée) après que celui-ci eût fait tuer sa femme et ses enfants. De cette situation simple, les auteurs (ils sont deux à se « cacher » sous le pseudo de « Ange ») sont partis pour inventer une histoire qui sonne comme un jeu de rôles. Il y a trois personnages centraux, tous les trois rescapés de la vallée prison : Erkor, le prince dépossédé, Sylvan, jeune magicien inexpérimenté mais plein de ressources et Amida, une redoutable guerrière qui fait partie de la « guilde des assassins ». Tous les trois vont faire alliance, d'abord pour s'échapper du piège que constitue cette vallée. Ensuite pour rendre son dû au prince spolié. Et les scénaristes de parsemer cette quête d'épreuves dans lesquelles les qualités de chacun des élus seront primordiales. Le festival peut commencer. Avec ces trois héros typés et dotés de dons personnels complémentaires, le lecteur ne sera pas déçu ! Tout au plus trouvera-t-il le personnage d'Erkor peu sympathique et souvent exagérément autoritaire (mais cela fait partie du rôle de guerrier qui lui colle à la peau). En résumé, il faut reconnaître que ça se laisse lire comme un scénario de jeu vidéo. Christian Paty y apporte sa touche, efficace mais sans grande surprise, appuyée sur un bon casting.
« Adalbert ne manque pas d'air », tome 1 de la série « Le roi catastrophe », par Sfar et Parme, dans la collection Jeunesse des éditions Delcourt.

Avec Adalbert, Lewis Trondheim confirme qu'il n'est jamais meilleur que dans les histoires de gosses. Et que plus elles sonnent « cour de récré », plus elles font rire. Les « Cosmonautes du futur » l'avaient déjà prouvé. La série « Monstrueux... » (Monstrueux Bazar, Monstrueux Noël, etc...) l'avait confirmé. Ce « Roi catastrophe » nous en donne la preuve éclatante. Non seulement le langage de Trondheim est juste, mais en plus son univers est d'une féroce drôlerie que le dessin très cartoon de Parme vient presque souligner en contrepoint. Car si jusqu'ici, les BD « enfantines » de Trondheim étaient volontiers poétiques et exaltaient une imagination foisonnante, cette fois, il y a un côté délibérément « sale gosse » qui est purement jouissif. Adalbert est un petit roitelet capricieux, colérique, égoïste au dernier degré. A tel point qu'il rêve de régner sur un monde où tous les enfants auraient ses traits et son caractère. Aussitôt rêvé, aussitôt ordonné : et voilà que des clones d'Adalbert remplacent tous les petits enfants du royaume. Mais bien vite, surgissent d'énormes problèmes que le tyran en culottes courtes n'avait pas prévus. Chaque histoire est un modèle d'humour, de dérision et de sympathique ironie. Celle du pique-nique est très drôle même si le lecteur aura assez vite compris où l'auteur veut en venir. Celle des mémoires d'Adalbert est peut-être moins comique, mais elle n'en est pas moins traitée avec brio. Il faut dire que le dessin « libre » de Fabrice Parme, à la manière des albums de la série « Monstrueux » (c'est-à-dire sans bords de cases sur un papier de couleur) met en valeur une stylisation remarquable qui donne en quelques traits des éléments d'une grande lisibilité et des visages très expressifs. Les enfants devraient adorer ce nouveau personnage, mais les adultes ne devraient pas le bouder non plus. Il renvoie à tous les côtés capricieux que nous avons développés, chacun à notre manière, lorsque nous pensions être les rois du monde, testant notre autorité d'enfant sur les adultes qui nous entouraient. L'une des très bonnes surprises de cette collection pourtant déjà d'un excellent niveau !
Pirate (Sang et Encre) par Thierry Bellefroid
« Pirate », tome 2 de la série « Sang et Encre » par Omond et Martin. Dans la collection Conquistador des éditions Delcourt.

Suite des aventures de « La Plume », le jeune lettré embarqué malgré lui avec les corsaires du capitaine Sneak. Des corsaires qui, grâce -ou à cause- de lui (voir tome 1), ont rompu leur lien d'allégeance avec la couronne et sont devenus de vulgaires pirates. « La Plume » raconte comment ce fier équipage se laisse entraîner dans un cercle d'oisiveté et de violence. L'album est très différent du précédent. Au destin inattendu du jeune homme s'est substituée une histoire de piraterie assez barbare qui fait la part belle à l'hémoglobine et aux gueules de brutes avinées et de tueurs hébétés. Ce travers est heureusement contrebalancé par la rencontre inattendue de Jean-le-Glabre qui relance l'intérêt de l'histoire. Jean-le-Glabre, pirate masqué dont « La Plume » va découvrir la véritable identité et qui va provoquer la perte de tout un équipage pour assouvir une simple vengeance personnelle. Jean-le-Glabre qui va aussi révéler à « La Plume » ce qu'est la véritable littérature et lui montrer les limites de son propre travail d'écrivain de bord. Bref, un album inégal (comme le précédent, d'ailleurs, mais sans doute meilleur quand même ) qu'Olivier Martin a abordé avec un dessin plus dur, à la plume plus visible. Mais lorsqu'on relit « Isaac le Pirate », la série que Christophe Blain a entamée il y a peu chez Dargaud, on mesure toute la différence entre cet exercice de genre et ce que peut être une véritable oeuvre personnelle.
Une plume pour Clovis par Thierry Bellefroid
« Une plume pour Clovis », par Gébé, à L'Association.

Après la réédition du mythique « An 01 », L'Asso s'est penchée sur une autre perle de Gébé, introuvable aujourd'hui... et jamais éditée dans sa version originale, c'est-à-dire en couleurs. Curieusement, en effet, « Une plume pour Clovis » a été publié en 1968-69 dans Pilote en couleurs et éditée en livre quelques années plus tard, mais... en noir et blanc. Le moindre des paradoxes n'est pas que cette édition originale « colorisée » paraisse plus de trente ans après sa création chez un éditeur jusqu'ici connu pour son catalogue intégralement en noir et blanc !
« Une plume pour Clovis » est un récit débordant de poésie dans lequel un homme de plus de 70 ans se lance à la recherche de son passé. Accusé d'être un vieil acariâtre par sa femme de ménage, Clovis se souvient de ses amis passés. Et lui revient, en regardant une vieille photo de classe, que son copain Casimir lui avait promis de lui offrir une plume de faisan avant de disparaître à jamais de la circulation. Clovis, 65 ans plus tard, retourne dans son village natal en pleine campagne et mène son enquête : qu'est devenu Casimir ? Complètement parano et pas loin d'être tout aussi givré, il va bousculer la vie du village et l'entraîner dans une folle aventure. Le vieil original est attachant malgré ses défauts et les trouvailles de Gébé sont touchantes d'une poésie qui sent bon les années post-68. Rien que de revoir cette Deuche dans le décor, c'est déjà tout un univers révolu qui se réveille, à fleur de dessin. Bon, c'est vrai, c'est parfois un peu naïf, surtout dans l'humour (le coup de la pipe mal éteinte qui met le feu au siège, on le voit venir à 2000 km !). Mais qu'est-ce que c'est frais !
Wendling par Thierry Bellefroid
« Wendling » aux éditions du Cycliste.

Claire Wendling, vue par elle-même. Dans un livre magnifique mais peu commenté, cette dessinatrice exceptionnelle livre quelques-uns de ses plus beaux cartons à dessin. Et on est à la fois étonné par la diversité de ses oeuvres et par la progression de sa technique. Remarquée dès le premier album de la série « Les lumières de l'Amalou » paru chez Delcourt il y a une dizaine d'années, Claire Wendling a depuis lors multiplié les expériences périphériques, délaissant (un peu trop à notre goût) la BD elle-même. Animation, dessins publicitaires et illustration l'ont monopolisée ces dernières années. Mais lorsqu'on découvre ses croquis préparatoires ou ses crayonnés au détour des pages de cet album, on est conquis, quel que soit le support final. Les animaux réalisés dans le cadre de recherches pour Warner Bros rivalisent de beauté avec les plus belles créatures de Disney. Cela n'empêche pas Wendling de s'inspirer du peintre Egon Schiele quelques pages plus loin pour ses croquis préparatoires à l'album d'illustration d'Aphrodite réalisé l'an dernier pour le compte des Humanos. Les dessins retouchés ou réalisés à l'ordinateur démontrent sa maîtrise de l'outil qui arrive à se faire totalement oublier. Et son imagination semble tout à fait intacte à la vue des dernières études de personnages pour des BD à venir. Bref, on peut se demander : mais qu'attend-elle pour s'y mettre ? Espérons que ce très beau libre ne constituera pas le seul zakouski « wendlingien » de l'année !
Rebelote par Thierry Bellefroid
« Rebelote », les aventures des Carroulet. Par Tofépi. Au Seuil.

Le Seuil est le spécialiste des BD « campagnardes ». Avec les albums de Bruno Heitz, l'éditeur n'a pas seulement lancé un héros (celui du privé à la cambrousse), il a osé un ton. Tofépi nous propose donc lui aussi sa cambrousse, elle est habitée par une famille très beauf (si ce n'étaient pas les enfants mais les parents Carroulet qui étaient les principaux protagonistes, ça pourrait être du Rabaté) avec des mômes qui ne manquent pas d'imagination pour occuper leurs journées. Ces trois-là sont gentiment gaffeurs mais surtout, s'inventent un monde avec deux fois rien. Leurs incessantes chamailleries sonnent juste et leurs rêves sont aussi terre à terre que peuvent parfois l'être ceux des gosses : avoir la collec complète des auto-collants Vache Qui Rit quitte à se rendre malade à bouffer boîte sur boîte... ou rêver d'argent de poche et tout faire pour en gagner, y compris transvaser tout le vin du père dans des bouteilles non consignées pour aller récupérer l'argent des consignes. Le moment le plus drôle étant sans doute la chasse aux moustiques pour nourrir « Looping », un bébé hirondelle trouvé dans la cour par les enfants. Bébert a imaginé une technique bien à lui qui consiste à transformer Sophia, sa soeur, en piège vivant. Dans la chambre aux fenêtres grandes ouvertes, allongée sur son lit en petite culotte, elle attire les moustiques que son frère assomme sans ménagement lorsqu'ils se posent sur son corps. Tofépi a un sens de l'observation aigu et son dessin apparemment naïf fait mouche. Cette famille de loufdingues m'a bien fait rire.
Julien (Le fer et le feu) par Thierry Bellefroid
« Julien », tome 4 de la série « Le fer et le feu », par Eric Stalner. Chez Glénat.

S'achevant par un clin d'oeil à la série qu'il dessine chez Dargaud sur scénario de Pierre Boisserie (« La Croix de Cazenac », pour ne pas la citer), Eric Stalner signe donc avec ce quatrième volume la fin d'une saga historico-romantico-familiale qui ne fera pas partie du panthéon de la BD mais qui aura su mêler les ingrédients de la grande aventure à ceux de l'Histoire... sans oublier l'amour. Ce quatrième tome devait clore le récit. Ce qui veut dire apporter toutes les réponses et dénouer les écheveaux patiemment tressés pendant les trois précédents. L'exercice est parfois dangereux. Combien de lecteurs, impatients d'avoir enfin la fin d'une saga qu'ils lisaient depuis plusieurs années, n'ont-ils pas été déçus à la lecture d'un tome de conclusion ? Souvent indigestes, bavards, trop ramassés, ce sont les albums auxquels on ne pardonne pas leurs erreurs. Si elle n'étonne pas vraiment, la conclusion imaginée par Stalner ne déçoit pas non plus. Elle fait même une incursion inattendue du côté de la folie et de la cruauté. Mais elle en frustrera quelques-uns car après nous avoir fait courir derrière un certain document pendant plus de deux cents pages, on pensait être en droit d'attendre davantage de précision sur son contenu. Le dessin d'Eric Stalner, fidèle à lui-même -c'est-à-dire statique et parfois maniéré- semble parfois vouloir se libérer sans vraiment y parvenir. Pour ma part, je regrette le tandem qu'il formait avec son frère. Leurs styles se mélangeaient bien et leurs défauts respectifs avaient plutôt tendance à s'annihiler qu'à s'additionner.
La nuit du lièvre par Thierry Bellefroid
« La nuit du lièvre », par Georges Van Linthout et Yves Leclercq. Dans la collection « Encrages » des éditions Delcourt.

Ceux qui ont lu les trois tomes de Falkenberg parus au Lombard seront sans doute étonnés de découvrir ce récit en noir et blanc publié dans l'excellente collection « Encrages ». Parce que le ton, le propos, l'univers et même le dessin sont totalement différents dans « La nuit du lièvre ». Privilégiant une BD plus adulte, un ton radicalement noir et proche du polar américain, une période -les années cinquante- et un lieu -un trou perdu des Etats-Unis- qui ne rappellent en rien leur précédent essai commun, les deux liégeois sont à la fois plus à l'aise et plus intéressants dans cet exercice. Sans doute le doivent-ils non seulement aux choix décrits plus haut mais aussi à une narration bien construite, fonctionnant par flash-back successifs pour aboutir à l'explication d'une situation donnée en début d'histoire. Cette construction, pour artificielle qu'elle soit, emmène le lecteur dans une histoire en forme de poupées russes. Au bout du compte, on ressort de ce livre noir avec le sentiment d'avoir lu un honnête polar aux ingrédients tantôt classiques tantôt originaux (le combat de boxe truqué qui foire d'un côté, le coup de grisou qui fait détaler les lièvres de l'autre) servi par des personnages humains, attachants, tous englués dans leurs petits défauts. Le dessin hésite entre réalisme et caricature, pas toujours pour le plus grand bonheur du lecteur. Il plante de belles ambiances mais manque souvent de justesse dans les proportions. Georges Van Linthout a au moins eu le mérite de faire table rase de tout ce qu'il avait acquis au travers des trois tomes de Falkenberg. Loin du dessin classique et semi-réaliste proche de la ligne claire qu'il y avait développé, il privilégie cette fois les personnages et les lumière, approchant parfois la fraîcheur d'un Etienne Davodeau.
« Le tombeau de l'ange », tome 1 des Immortels, par Desberg et Reculé. Chez Glénat.

Si cette BD ne se vend pas, qu'est-ce qu'il faut faire, alors ? Les Immortels, c'est un peu de tout ce qui marche ailleurs, revu à la sauce Desberg/Reculé. Un peu des Stryges de Corbeyran, un peu du trait de Marini, un peu de la mise en page, des couleurs et du casting du Troisième Testament (l'explorateur, père de l'héroïne Rio, ressemble vraiment beaucoup à Conrad de Marbourg, lui-même pompé sur Sean Connery...). Desberg et Reculé se connaissent bien. Ils ont déjà réalisé ensemble deux tomes du « Crépuscule des anges » qui n'ont rien à voir avec les anges ici présents, en dépit d'un titre qui pourrait semer la confusion. Dans ce nouvel univers, Desberg nous montre un ange victime de sa compassion pour les hommes et nous propose une nouvelle variation de la lutte du Bien et du Mal. En jouant sur des époques différentes et sur l'opposition entre la Terre et les scènes se déroulant au paradis, il nous offre aussi la possibilité d'entrer dans la vie de ces anges et de jouer une carte un peu plus inédite : celle des sentiments amoureux entre ces êtres « divins ». C'est sans doute dans cette tentative d'humanisation des anges que résident les qualités d'un scénario somme toute assez classique. Mais comme Reculé a mis toute la sauce, épaississant son trait (parfois à la limite de faire du Pellejero comme cette vignette en bas de la planche 14 par exemple) et dynamisant son dessin, tout cela fonctionne plutôt bien. Le rythme y est, et même si l'on pense à Rossi ou à Marini au gré des pages, on doit reconnaître que le dessinateur du dernier tome du Cercle des Sentinelles (toujours avec Desberg au scénario, en remplacement de Wurm, qui avait créé la série) a fait des progrès. Le visage d'Ashra semble sorti tout droit du Crépuscule des Anges mais c'est bien l'une des rares répétitions que l'on trouve entre les deux séries, tant Reculé semble s'être réinvesti dans ce nouvel univers. On aimerait l'y voir débarrassé de ses influences.
« Juste un île », tome 1 de la série « Les compagnons de fortune ». Par Franz, aux éditions Delcourt.

C'est une farce, une grosse farce, que nous a concoctée Franz. « Les compagnons de fortune » utilise en effet toutes les ficelles du burlesque, même si les premières pages ne le laissent guère penser. Car c'est vrai que les débuts sont un rien difficiles. On ne s'identifie guère aux personnages et les situations ont un côté trop éculé pour qu'on suive l'histoire avec enthousiasme. La mise en page étriquée de Franz achève de consumer les bonnes volontés. Mais les lecteurs plus assidus sont récompensés ensuite, lorsque surviennent les véritables ingrédients de la saga d'Andrew. Il y a d'abord la rencontre de « la » sauvage sur son île déserte, baptisée Tim. Puis celle « du » pirate, « Pas-de-quartiers », qui va emmener Andrew avec lui. Ces deux personnages font basculer le récit et permettent à Franz d'enfin prendre ses distances avec toutes les autres aventures du genre. A partir de là, c'est une pièce de théâtre de boulevard qu'il nous joue sur le mode de la flibuste. Pour peu qu'on accepte la règle du jeu, on s'amuse, notamment grâce aux apartés de la plupart des personnages. Bon, d'accord, c'est gros, souvent même très gros. Et le scénario use de ficelles un rien trop évidentes (la fin est en effet très facile) mais c'est tellement inattendu dans l'univers de Franz (pensez donc, il n'y a même pas de chevaux dans cet épisode !)... Bref, un moment de détente sans prétention qui ne pourra se prolonger dans d'autres albums qu'à condition de jouer à fond sur l'humour. Car pour le reste, il y a dix exemples de BD de flibuste cent coudées au-dessus.
Pascin - tome 5 (Pascin) par Thierry Bellefroid
« Pascin Tome 5 » par Joann Sfar. A L'Association.

L'air de rien, Joann Sfar nous a déjà pondu plus de cent cinquante pages d'aventures « pasciniennes ». On commence à frôler le monument ! Il faut dire qu'en plus, ce cinquième opuscule est certainement l'un des plus réussis. S'éloignant de plus en plus de l'exégèse (qui n'a jamais été son but premier, d'ailleurs), Sfar promène « son » Pascin sous la lumière crue du Midi et joue pour une fois du pinceau presque autant que de la plume, s'amusant à traiter certaines cases au lavis. La planche 140 et surtout la 145 (magistrale !) nous montrent qu'il sait y faire lorsqu'il faut mélanger l'encre de Chine pure et l'encre délayée dans un même dessin. Les planches 134 et 135, si elles jouent en revanche sur l'encre de Chine non diluée, proposent une palette subtile qui trouve sa raison d'être dans cette première histoire « Villa America » où lumière et chaleur sont très perceptibles. Ce récit -le plus touchant depuis le début de la série- est superbement découpé et traité par Joann Sfar qui semble s'amuser comme un fou à faire cohabiter l'ingénuité de la jeune Ada et le trouble qu'elle provoque chez le peintre. Je crois que j'ai relu ces neuf pages trois ou quatre fois, tellement je les trouvais belles, équilibrées, artistiques.. et emplies de la tendresse complice que Sfar a pour ses personnages.
Portrait de femmes avec tueur par Thierry Bellefroid
« Portrait de femmes avec tueur », par Katou et Andréa H. Japp. Dans la collection « Petits Meurtres » des éditions du Masque.

Un thriller psychologique comme on les aime. Une enquête « à l'américaine », avec serial killer complètement psychotique et fausses pistes en pagaille. Des héroïnes qui nous changent des pelletées de privés et autres enquêteurs du « effbihaïe » qu'on a trop vus ou lus. Elles sont deux. L'une est profileuse (un métier très à la mode) et l'autre est une spécialiste de la lutte antiterroriste qui échoue un peu par hasard dans ce tandem. Elles vont se retrouver face à une « épidémie » de cadavres savamment dépecés et mis en scène par un détraqué qu'elles doivent pousser à l'erreur. C'est classique et pourtant, on a l'impression de ne pas avoir lu « ÇA » souvent en BD. Peut-être la formation de biochimiste et de toxicologue d'Andréa H. Japp (aujourd'hui romancière chez Flammarion et aux éditions du Masque, où elle est directrice de collection) est-elle à l'origine de cette approche presque scientifique du serial killer à laquelle la BD ne nous a pas habitués. Toujours est-il qu'on dévore ce bouquin de près de 120 pages d'une traite. Le dessin de Katou (l'un des fondateurs des « Requins Marteaux ») est noir, sec et ombragé juste ce qu'il faut pour servir une histoire qui peut être considérée comme l'une des meilleures de la collection.
« Madame la lune », par Jean-Luc Loyer, Nathalie Ferlut et Thierry Leprévost. Chez Delcourt Jeunesse.

La collection Delcourt Jeunesse ne manque pas de talents. Elle est sans doute à ce jour la seule vraie collection de BD pour enfants (à ne pas confondre avec les livres illustrés pour enfants qui pullulent) à se maintenir avec régularité et qualité constantes. Ce « Madame la lune » nous emmène à la rencontre de personnages adorables, qui fabriquent les rêves des enfants, quelque part sur leur bateau, dans le ciel. Et qui découvrent soudain l'existence d'autres fabricants de rêves... mais méchants ceux-là, les fabricants de cauchemars. S'en suit une confrontation dans laquelle les trois personnages principaux vont montrer leur courage et leur détermination alors même qu'ils étaient dévolus aux tâches les moins prestigieuses sur le navire des rêves : pousser les étoiles dans le ciel à coups de râteau. C'est mignon tout plein, c'est forcément une BD qui pousse les enfants à explorer l'imaginaire et c'est très joliment dessiné. Ce qui ne gâche rien : le personnage central est une fille qui a un peu de mal à s'imposer dans un monde imaginaire, certes, mais un rien macho !
Protocole Oslo (Travis) par Thierry Bellefroid
« Protocole Oslo », le tome 4 de la série Travis. Par Duval, Quet, Schelle et Rosa. Dans la collection Neopolis des éditions Delcourt.

Fred Duval est un fameux scénariste. Que ce soit avec Carmen Mc Callum ou Travis, ses deux séries, il arrive à ferrer le lecteur dès les premières pages et à garder intact le suspense pendant plusieurs épisodes. Ses histoires sont denses, intelligentes, extrêmement bien découpées, populaires dans le sens positif du terme. Et ses héros sont attachants. Le souci du détail ajoute une touche de crédibilité à l'ensemble. Que dire d'autre sans paraître suspect ? Travis ne faiblit pas. Cet avant-dernier épisode du premier cycle nous emmène à un rythme toujours aussi musclé dans une station orbitale de l'ONU pour une négociation entre les deux grands groupes agroalimentaires rivaux -Transgenic et Baxter & Martin- où va se jouer une sérieuse partie de poker menteur. C'est Pacman -le hacker surdoué- qui tire les cartes, cette fois. Et qui en apprend un peu plus au lecteur sur le commanditaire des attentats qui se sont succédés depuis le premier album. On en saura juste assez pour imaginer la grande confrontation finale. Mais avec Duval, il faut s'attendre à des retournements de situation jusqu'à la dernière minute. Le moindre d'entre eux, dans cet album-ci, n'est pas de voir deux des plus fidèles ennemis de Travis -Pacman et Vlad- lui prêter main forte pour faire triompher le bon droit ! Mais pas la peine d'en dire plus, la lecture de ce quatrième album est un must pour les lecteurs de la série. Elle est hautement recommandable pour les amateurs de bonnes histoires de politique-fiction futuristes. Le dessin et surtout le découpage de Christophe Quet assurent le rythme côté visuel. Du travail de pros.
« Le dernier voyage d'Opa Julius », volume 1 de la série « Ingrid » par Isabelle Dethan, dans la collection Encrages des éditions Delcourt.

Après « Tante Henriette ou l'éloge de l'avarice », Isabelle Dethan avait le choix entre deux options. Ou continuer d'explorer une veine semi-biographique saluée par la critique (mais pas par sa famille, dont un membre la traîne en justice ). Ou renouer avec les univers de ses deux premières séries -Mémoire de sable et Le roi cyclope-, travail sans doute moins personnel mais assurément plus « vendeur ». Elle a choisi la voie la moins commerciale. Et à ce titre, on ne peut que l'en féliciter... ainsi que son éditeur qui aurait pu lui demander de revenir à une collection et un format plus visibles. Passé ce constat, il faut reconnaître que le travail réalisé par Isabelle Dethan sur ce nouvel épisode de la vie de sa famille dépasse largement en qualité celui -pourtant déjà remarquable- effectué sur « Tante Henriette ». Il y a dans ce premier volume des « aventures » de sa mère allemande une véritable générosité et un ton parfois bouleversant. Je l'avoue -et cela ne m'arrive pas souvent-, j'en ai eu les larmes aux yeux.
Grâce au prisme de l'enfance, Isabelle Dethan arrive à faire passer des sentiments et des événements qui, plus de cinquante ans après la fin de la guerre, ne sont pas aisés à faire partager aux « vainqueurs » que nous fûmes. Comment se prendre de pitié ou de compassion pour une famille allemande qui assiste à la débâcle de ses armées, qui découvre l'occupation, les rationnements, la privation de liberté ? Isabelle Dethan y parvient sans forcer le trait, avec une sensibilité, une justesse de ton, une légèreté exemplaires. Son dessin toujours aussi remarquable ne fait qu'y aider un peu plus. Choisissant un lavis proche des tons sépias, elle se rapproche étonnamment de « La guerre d'Alan », le récit fleuve entamé l'an dernier par Emmanuel Guibert et qui raconte... la vie d'un GI américain durant la même période. Les deux livres sont appelés à se compléter. Avec un graphisme très différent, ces deux auteurs de talent ont choisi de raconter une histoire d'hommes et de femmes, pas une histoire de guerre. Tous les deux se sont laissés guider par l'amour qu'ils avaient pour leur principal protagoniste. Guibert pour son ami, Alan Ingram Cope. Isabelle Dethan pour sa mère, Ingrid. A lire absolument.
L'Or Bleu (Stéphane Clément) par Thierry Bellefroid
« L'or bleu », une aventure de Stéphane Clément, par Ceppi. Aux Humanoïdes Associés.

Dixième tome des aventures de Stéphane, du moins si l'on prend en compte la numérotation des Humanos. Car les anciens lecteurs de la série auront remarqué que l'un des sept premiers albums parus entre 1977 et 1986, « La malédiction de Surya », n'a pas été réédité dans la nouvelle collection grand format des Humanos. Résultat, ce tome 10 est en fait... le tome 11. Mais n'ergotons pas. Ce « dixième » tome des aventures de Stéphane Clément renoue avec les meilleurs moments de la série. Pas seulement parce qu'on y retrouve un très ancien protagoniste, Ömer, ni même parce que Stéphane retourne à Istanbul où ont véritablement commencé ses aventures (après un premier album qu'on pourrait qualifier de mise en place (Le Guêpier), « A l'Est de Karakulak » inaugurait en effet une série d'histoires qui allaient mener le héros de la Turquie à l'Inde et créer l'engouement pour les aventures de Stéphane). Si l'on peut dire que cet épisode renoue avec les meilleurs moments de la série, c'est surtout parce que Daniel Ceppi y donne toute la mesure de son talent de « reporter de fiction ». S'appuyant sur des éléments d'actualité (ce qu'il fait d'ailleurs depuis toujours), il plante le décor d'un épisode à la fois grave, palpitant et intéressant qui emmène le lecteur au-delà de la simple aventure. Stéphane est à nouveau plongé dans une histoire qui le dépasse. Mais cette histoire, c'est l'Histoire elle-même. Ceppi imagine en effet une révolte unifiée de l'ensemble des Kurdes répartis sur les quatre pays que sont la Syrie, la Turquie, l'Iran et l'Iraq (on en trouve aussi en Arménie et dans une moindre mesure au Liban, mais les quatre pays choisis pour cette histoire forment réellement ce qu'il est convenu d'appeler le Kurdistan). Et il construit une sorte de piège qui va se refermer sur Stéphane et le faire participer de près à une sordide page de politique fiction. Les ingrédients sont solides, les bases sur lesquelles s'appuient l'auteur suisse ne sont pas laissées au hasard. Au coeur de la question qui unit cette mosaïque d'Etats et de peuples : l'eau, que l'on sait être un des enjeux essentiels au Proche Orient. Bref, la trame est sans faille. Mais il n'y a pas que ça. En 1995, « Pondicherry, filiation fatale », le premier album des aventures de Stéphane Clément après neuf ans d'absence renouait avec les décors de la série initiale, mais pas avec l'ambiance. Plus encore, les deux suivants s'éloignaient géographiquement de l'univers du premier cycle de sept albums et semblaient trop inspirées par la lecture des journaux. Cette fois, tout y est. Les lieux et les gens. L'ambiance et la sincérité. Peut-être le ton est-il plus grave qu'à l'époque. Peut-être faut-il y voir l'envie de Ceppi de proposer une BD passée de l'adolescence à l'âge adulte à l'instar de ses protagonistes. Toujours est-il que « L'or bleu » est une histoire remarquable et que le dessin de Daniel Ceppi, toujours plus réaliste, s'attache volontairement à l'efficacité de son propos plutôt qu'à des critères esthétiques (ni Bosphore ni Basilique sainte Sophie ni minarets de la mosquée Süleymaniye dans cette nouvelle vision d'Istanbul, par exemple). Dommage qu'après tant d'années de pratique, il ne maîtrise toujours pas les regards de ses personnages. Mais c'est bien peu de choses...
La Solimère (Aquilon) par Thierry Bellefroid
« La solimère », tome 1 de la série Aquilon, par Istin, Michel et Paitreau, chez Soleil.

Soleil exploite bien son fonds de commerce. A tel point qu'on finirait par confondre les séries entre elles. Interchangeables, les récits sont basés sur une recette immuable, qu'on a presque envie d'appeler « La Méthode Arleston ».
-Prends un univers imaginaire plus ou moins féerique. Installes-y des peuples en guerre les uns avec les autres. Trouve un élu, invente-lui une quête. Ajoutes-y une dose de muscles, de la baston, un rien d'humour, voire une compagne aux formes généreuses (ce n'est pas le cas ici). Tu es prêt pour être publié dans Lanfeust Mag est faire parler de tes héros dans les cours de récré.
Bon, je caricature un peu. Et je reconnais à Arleston un talent certain de conteur d'histoires que n'ont pas nécessairement tous ses clones, de plus en plus nombreux. J'ajoute qu'Aquilon n'est pas plus mauvais qu'un autre et qu'il trouvera sans aucun doute son public dans cette veine que Mourad Boudjellal exploite en éditeur avisé. Voilà qui devait être précisé.
Alors, venons-en à cette nouvelle série imaginée par Jean-Luc Istin. Je reconnais que ce qui m'a un peu énervé à la lecture de cet album, c'est le recours à un vocabulaire qu'un lecteur normal peut difficilement digérer en une lecture. Créer un univers ne se limite pas à rendre compliqués tous les mots employés par les protagonistes. Encore une fois, ce jugement est un peu exagéré, je l'admets. L'univers d'Aquilon ne se limite pas à ça, c'est vrai. Mais Istin complique à souhait un récit qui jusque là est somme toute assez simple. Et en refermant la dernière page, on se demande s'il fallait 46 pages pour que Gal et Aquilon chevauchent ensemble vers... la prochaine digression avant leur chasse aux « vennkiz ». Bref, je suis modérément convaincu. Même si le dessin de Guy Michel m'a semblé très en rapport avec le type d'histoire, ménageant quelques effets efficaces, comme la découverte de la « reine-mère ». Peut-être la violence exagérément crue des pages 18-19 a-t-elle du mal à passer. Ou peut-être que j'étais levé du pied gauche. Allez savoir...
NDE (Fox One) par Thierry Bellefroid
« NDE » troisième volume de la série Fox One, par Olivier Vidal et Renaud Garreta. Paru chez Wilco Editions.

Fox One, c'est un peu le Buck Dany des temps modernes. Une BD qui mêle l'aviation à des histoires ancrées dans leur temps. Ici, la disparition d'une quinzaine de tonnes de plutonium, transporté secrètement sur un cargo français faisant route vers le Japon. Du plutonium que les pilotes du porte-avions Charles de Gaulle croisant en Mer de Chine vont tenter de récupérer, bien sûr. Deux héros : Mattéo Conti et Hannah Bergson, la première ayant mystérieusement disparu au cours d'une mission de reconnaissance et le second étant suspecté de ne plus être tout à fait opérationnel depuis que la disparition de sa coéquipière l'obsède. Un « méchant » de service, au sein de l'escadrille, qui vendrait sa mère pour faire « tomber » Mattéo. Et un typhon qui vient jouer les « shaker » dans tout ça. Voilà les ingrédients de ce thriller technologique dont les auteurs revendiquent avoir passé un certain nombre d'heures avec des pilotes de chasse sur des bases aériennes comme sur des porte-avions, et avoir potassé un maximum de documentation. Avec les 80.000 albums qu'il affirme avoir vendus pour les deux premiers tomes, l'éditeur ne doute pas un instant détenir une poule aux oeufs d'or. Il est vrai que face à des concurrents de plus en plus faiblards, ce thriller aéronautique fait figure de challenger. Le dessin hyper réaliste de Renaud Garreta est proche de la photo et rend très bien les notions de vitesse ou de fureur des éléments. Et la crédibilité est poussée à l'extrême, avec tout ce que cela comporte d'exagération (termes techniques surabondants avec renvois en bas de page.) Bref, ça fonctionne. Et cela prouve au passage que le créneau a encore de l'avenir. En revanche, la douzaine de pages qui termine l'album ne m'a pas tout à fait convaincu. Le titre -« NDE » pour Near Death Experience- laissait présager une histoire où l'un des protagonistes flirterait avec la mort. Mais ce final qui arrive sans prévenir et laisse le lecteur interrogatif avait-il vraiment sa place dans l'histoire ou vient-il, en « guest star », rehausser un scénario qui pouvait paraître trop conventionnel sans ça ?
Viva Pâtàmâch ! par Thierry Bellefroid
« Viva Pâtâmâch ! ». Par Capron et Killoffer.

L'auteur de Rancho Bravo et de Chiquito La Muerte nous a habitués à des histoires décalées, gentiment déjantées. Cette fois, on a envie de dire qu'il s'est surpassé. Roseville, entièrement sous la coupe d'une sorte de dictateur éclairé déguisé en grand industriel sauveteur de la ville, il fallait l'inventer. Dans cette « bulle » vivant en totale autarcie, tout le monde mange, mâche et emploie du bubble gum. Il sert de nourriture exclusive mais aussi de matière première pour les bretelles de cartable comme les films de cinéma. Un « premier de classe », Roger, va vouloir inscrire son nom dans l'histoire et mettre ses connaissances au service de ce beau produit. Il gravit très vite les échelons du pouvoir et devient le bras droit de Rosemou, l'inventeur de la pâte à mâcher, mais aussi le tyran qui règne sur la cité. Commence alors une rocambolesque descente aux enfers qui va durer plus de dix ans, pendant laquelle « Monsieur Roger » va approcher la terrible vérité. Un conte presque moral, une histoire à la fois surréaliste et très politique où l'on reconnaît les qualités de Capron. Mais aussi un récit mis en images par l'un des créateurs de L'Association trop rare en BD : Killoffer. Traînant derrière lui une (injuste ?) réputation de dessinateur en retard, Killoffer a mis trois ans pour venir à bout de cette histoire. Le résultat est déconcertant. L'album se présente comme un moyen format en noir, blanc et... rose. Le rose étant la couleur de la pâte à mâcher qui est presque l'une des héroïnes de l'histoire. C'est original, esthétiquement discutable mais sûrement beaucoup moins innocent qu'il y paraît de prime abord. Viva Pâtâmâch est un récit dense, qui se prolonge sur 130 pages et nous propose une réflexion sur le pouvoir, le mensonge, la manipulation.
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