Les 66 critiques de Michael Day sur Bd Paradisio...

« Le Bal des gargouilles » tome 2 de « Extra-Muros », par Hulet. Chez Casterman.

Ce deuxième tome se pose comme un album charnière. Si les ambiances posées par Hulet sont toujours à la hauteurs des attentes (et collent parfaitement à ce récit ésotérico-historico-policier), l'intrigue, quant à elle, patine un peu dans la gadoue. Si le premier tome (« La Griffe du Diable ») posait les éléments - Mordange un petit village typique en passe d'être « bradé » à des promoteurs, des joueurs de jeu de rôles, un ancien mystère templier, etc. -, ce deuxième tome, au lieu de clarifier les pistes, mêle le tout en un écheveau inextricable. Les rôles changent, les interactions entre protagonistes se « complexifient », l'intrigue se densifie, etc. Ce n'est pas un mal en soit - vous ne m'entendrez jamais me plaindre d'une intrigue complexe ou dense -, mais le sentiment dominant à la lecture de ce « Bal des gargouilles » est qu'à force de vouloir feu de tout bois, la compréhension de l'intrigue souffre grandement. La voie actuellement empruntée par « Extra-Muros » tend à prouver qu'à vouloir trop (bien) faire, on perd plus son lecteur qu'on ne le guide ; cependant je ne doute pas que Hulet, en grand professionnel qu'il est, épaulé par son éditeur, un médiéviste reconnu spécialiste des templiers, décante et clarifie le tout dans le 3e tome de cette trilogie. En définitive, « Extra-Muros » jouit encore du bénéfice du doute et de tous les a priori positifs que j'ai pour l'auteur et son oeuvre. Le tome 3 sera donc la clé : série indispensable à classer à côté du « Triangle Secret » et du « Décalogue », ou simple divertissement teinté d'ésotérisme ? Soyons optimistes... un classique du genre est probablement né.
« Fondu au noir » bobine 1 de « L'Ombre du cinéphage », par Gaudin et Gnoni. Chez Soleil.

A l'instar d'un « Comptine d'Halloween » (Delcourt), voici une série destinée aux vrais amateurs de fantastique. Pas celui qui fait peur et qu'on lit à la lueur d'une chandelle... Non... Celui qui fait la une de magazines tels « Mad Movie » ou « L'Ecran fantastique », ce fantastique sanglant, hurlant et hautement référentiel. Côté références, ce premier tome est une petite mine de ce que certains esprits chagrins appelleront « clichés » et que les fans reconnaîtront comme des « hommages » (quel plaisir de voir un vieux cinéaste/producteur campé par un sosie de papier du grand, du génial, du fabuleux, du [à compléter], John Carpenter). Gaudin nous prouve, une fois encore, que s'il n'est pas un scénariste « au génie médiatique », il n'en demeure pas moins un vrai bosseur, doté d'une culture du genre plus qu'appréciable, qui sait raconter des bonnes histoires. Et n'est-ce pas là ce que la plupart des amateurs de BD recherchent en ce moment. Voilà donc un récit bien construit (les jeux narratifs entre réalité et extraits de film sont bien amenés) qui ravira les amateurs du « genre ». Comme toute médaille possède son revers, cet album souffre d'une faiblesse qui en fera reculer plus d'un : le dessin. Ne jetons pas la pierre à ce jeune auteur qui fait ses premières armes dans cette première bobine. Même si son coup de crayon est en adéquation avec le récit, il n'en demeure pas moins parfois malhabile... Cela dit, une fois cet écueil passé, on se prend à attendre la deuxième bobine avec une impatience non dissimulée.
« Saisi à froid » tome 1 de « Pankat », par Merwan. Chez Vents d'Ouest.

Voilà un jeune auteur dont tout laisse à penser qu'il est adepte du manga (de « Coq de combat », probablement) et assidu aux films de combat (les Bruce Lee, « Fight Club » ou « Ong Bak »), sa première ( ?) série « Pankat » le prouve à chaque planche. Qu'est-ce que le « Pankat » ? Un sport de combat, mixe entre la boxe thaï et le kung-fu - la lecture de certaines séquences, je pencherais même plus pour ce sport olympique antique : le pancrace - qui déchaîne les foules dans un univers médiévalo-oriental et, surtout, dans la grande cité d'Irap, où se déroule le tournois de la saison changeante. Côté scénario, rien de très original, car l'intrigue repose sur la trame classique « du petit gars de la campagne qui a tout sacrifié et monte à la ville pour prouver au monde qu'il est un super combattant ». Cet album impressionne par contre par ses qualités narratives. Si le dessin est très expressif - bien que les personnages soient rarement avenants -, il souffre parfois de quelques approximations « de jeunesse ». Mais toutes ces petites imperfections sont largement compensées par un dynamisme et un découpage impressionnants. Les ambiances d'arènes et de combats sont particulièrement efficaces et énergiques. On ne peut que s'en réjouir vu le propos de l'album... Voici donc un premier titre qui nous permet de découvrir un auteur à suivre tout en remplissant son contrat : un bon récit de baston à la mode de « Hong Kong ».
« Pieuvre à la Pouy », tome 14 du « Poulpe » par Mizio et Cestac. Chez 6 Pieds sous Terre.

Autant que ce soit clair : je suis un fan du « Poulpe ». En salade, j'adore. En grillade, je tuerais père et mère pour me gaver des miettes. En roman, j'en ai bourré à craquer des rangées entières de ma bibliothèque. Au cinéma... euh... je passe mon tour. Et en BD, je perds toute objectivité et je pardonne les errances d'albums pas toujours au top. Mais là... Ce 14e tome est un pur régal, une jouissance épicurienne ! Étrangement, ce « Pieuvre à la Pouy » n'est pas une adaptation d'un des nombreux romans, mais une méta-lecture du phénomène céphalopode. Les auteurs s'en donnent à coeur joie pour nous expliquer qui sont Gabriel « Le Poulpe » Lecouvreur, son géniteur (Jean-Bernard Pouy), la bible de l'univers, les personnages secondaires, etc., tout en jouant d'autodérision et en distordant les codes de la narration BD. Je dois bien reconnaître qu'il y avait bien longtemps que Florence Cestac ne m'avait pas autant fait rire. Bref, un beau bordel, anarchique à souhait, qui ravira les gourmets amateurs de cuisine au poulpe.
Le vagabond par Michael Day
« Le Vagabond », par Jorge et Gonzalez. Chez Glénat/Caravelle.
[Extrait de la vie quotidienne d'un chroniqueur (pas) mondain]
Tiens, un nouveau Mattotti ? Non ?! Ok, encore des gars qui tentent de copier leur maître... hop, sous la pile... On y reviendra bien un jour pour caler une bibliothèque bancale.
[Un mois plus tard]
Tiens, c'est quoi ce bouquin ? Ah oui, le « Mattotti-like »... Qu'ai-je encore à lire ? Le bouquin de Beineix... euh... bon, ok... va plutôt pour « Le Vagabond ».
[Une heure plus tard]
Tiens chérie, lis ça. C'est un super bouquin ! En plus tu vas adorer, ça ressemble, à première vue, à du Mattotti, mais à la lecture on se rend compte que ce Jorge Gonzalez a une sacrée patte. Par ses couleurs (splendides !), il parvient à poser des ambiances d'une rare intensité. Côté scénario, son compère n'est pas en reste. C'est (sans en avoir l'air) un pur polar, oscillant avec intelligence entre ambiances intimistes et poisseuses, rehaussé de quelques conflits familiaux. Du rythme, de l'efficacité, des images en totale adéquation avec le propos, ce « Vagabond » est vraiment une excellente surprise. A découvrir (une fois les a priori rangés) !

A.L.I.E.E.N. par Michael Day
« A.L.I.E.E.N. », par Lewis Trondheim. Chez Bréal Jeunesse.

Amis des acronymes, bonjour ! « A.L.I.E.E.N », comprenez « Anthologie de Littérature Infantile Extraterrestre Egarée Négligemment », est un petit bijou de bande dessinée comme le sieur Trondheim en a le secret (s'il pouvait le passer à d'autres, la BD « jeunesse » aurait de bien beaux jours devant elle). Le livre n'est autre que la publication d'un ouvrage abandonné par des extraterrestres dans les Cévennes... (fans de dédicaces, allez dans les Cévennes, vous y trouverez certainement l'auteur en quête d'autres perles d'un autre monde). Outre l'histoire, qui mêle habilement cynisme, violence et scatologie, cet OVNI brille par la leçon de narration que nous donne l'auteur. En effet, en 92 pages, l'auteur nous prouve qu'il est possible de se divertir et de comprendre une histoire alors que (a) les personnages changent à chaque chapitre, (b) l'impression est volontairement « salopée », (c) les héros sont des extraterrestres qui (d) parlent une langue incompréhensible aux humains (ma plus grande frustration restant d'ailleurs de lire, par réflexe, des phylactères par essence illisibles) ; (e) le tout étant raconté en respectant un gaufrier à 6 cases (hormis pour les planches d'ouverture de chapitre). Bref, un petit moment de lecture « oubapien » qui, dans un premier temps, rafraîchit les neurones avant dans les échauffer lors d'une relecture plus « analytique ». Intellectuellement jouissif, voire bêtement divertissant.
« Les Taupes » tome 3 des « Nouvelles aventures de Mic Mac Adam », par Luc et Yves Brunschwig et Benn. Chez Dargaud.

Me voilà rassuré... Mic Mac Adam retrouve une place dans mon imaginaire. Comme signalé dans une précédente chronique, le premier tome de cette reprise en main m'avait plutôt plu, le deuxième, par contre, m'avait profondément ennuyé. Le troisième, heureusement, vient, à nouveau, titiller ma nostalgie et mon goût pour les aventures fantastico-fantaisisto-policières de l'enquêteur en kilt. Ce nouveau volume (se) joue des contrastes. Contrastes dans le dessin de Benn qui parvient à allier trait humoristique et noirceur du récit ; contrastes entre le rythme assez lent des premières planches et le final intense du dernier tiers d'album ; contrastes entre les tranchées et les clowns, etc. A la lecture de ce tome, il semble que l'arrivée d'un troisième larron - Yves Brunschwig, frère de Luc - est un réel liant entre deux auteurs talentueux qui ne semblaient pas trouver le bon moyen d'expression dans les premiers albums. Une chose semble donc certaine - et rassurante -, Mic Mac Adam est bel et bien de retour !
« La Comtesse Volodine » tome 1 de « Tony Corso », par Berlion. Chez Dargaud.

Vous vous souvenez de « Magnum », cette série TV - tellement mythique quelle donnera lieu à remake hollywoodien d'ici peu - dans laquelle le beau Tom S. roule en Ferrari, ennuie l'intendant de la propriété dans laquelle il « squatte », et résout des enquêtes, chemise hawaïenne au vent et jolies nanas au bras. Prenez les mêmes ingrédients, quittez Hawaï pour Saint-Trop' et vous obtenez « Tony Corso ». C'est efficace et rafraîchissant comme un cocktail pris en terrasse une journée de canicule... mais aussi vite oublié. Outre le professionnalisme de l'auteur et de l'éditeur un vrai récit « tout public » suffisamment aguicheur (et aguichant), mais dénué de vulgarité -, ce premier tome possède deux qualités indéniables. Tout d'abord, sa date de parution : voici un livre parfait pour les vacances, la plage et les voyages en train. Ensuite, ses 56 pages qui en font un récit complet (on évite ainsi le traditionnel diptyque à la sauce diluée ou, pire, l'enquête saucissonnée en une série interminable). « Tony Corso » est donc une production estivale des plus honnêtes, qui remplit pleinement son cahier des charges : nous faire passer un bon moment.
« Le Prix de l'argent » tome 13 de « Largo Winch », par Van Hamme et Francq. Chez Dupuis.

Messieurs les auteurs, veuillez accepter mes plus plates excuses. Je vous prie de me pardonner d'avoir cracher mon fiel durant trois (voire quatre) diptyques, vous maudissant d'user et d'abuser de ficelles grosses comme mes cuisses et de vous plaire dans la facilité. Messieurs les auteurs, bravo ! Force est de constater, à la lecture de ce 13e tome, que les grands professionnels que vous êtes avez cette capacité de rebondir, de resserrer votre narration et votre dessin, pour nous offrir à nous, vils fans toujours avides de perfidie, un récit carré, efficace et rondement mené. Certes nous ne sommes pas devant une de ces oeuvres métaphysiques ou autobiographiques qui plaisent tant aux chroniqueurs BD, mais voilà un début de « cycle » qui prouve - à l'instar des romans policiers de l'été - qu'il est possible d'agrémenter une trame classique d'assez d'éléments « surprenants » ou « audacieux » pour tenir en haleine le lecteur en quête de divertissement facile. Un vrai récit populaire, accessible à tous (même aux plus fervents détracteurs de ce 9e art qui nous plaît tant), qui évite le piège du racolage vulgaire dans lequel tombent trop de productions dites « grand public ».
« Mercredi Night Fever » tome 3 de « Andy & Gina », par Relom. Chez Fluide Glacial.

« Andy & Gina » sont à l'humour en bande dessinée ce que Cannibal Corpse est à la musique ! Cynique, caustique, dur, violent, noir, immoral, cinglant, tranchant... Les termes manquent pour qualifier l'ampleur des ravages que Relom opère sur mes zygomatiques. Comme mon honorable confrère Thierry B. - qui vous a dit tout le bien qu'il pensait des deux premiers tomes de la série -, je me dois de vanter les mérites de ces histoires courtes bêtes et méchantes. Dans ce troisième tome, j'avoue que mon faible se porte sur la déclinaison du gag, bien connu, « pas de bras, pas de chocolat » - pour rappel la mère des deux garnements est une femme tronc ! - en « pas de cœur, pas de docteur ». Un regret toutefois : le passage à la couleur enlève un peu de noirceur (sans mauvais jeu de mots... quoique) à l'ensemble. Enfin, comme j'ai pu remarquer qu'aucun d'entre vous n'avait osé poster de chronique à propos des deux tomes précédents, je m'engage à offrir un ex-libris (un beau portrait de famille) à tous ceux qui liront ce tome 3 et le chroniqueront !*


(* Toi qui a lu cet album et en a rédigé une jolie chronique, regarde en C2 de la première édition... le voilà ton ex-libris... tu t'es fait eu !)
DollyMorphing (Yoni) par Michael Day
« DollyMorphing » tome 1 de « Yoni », par Yann et Berthet. Chez Dupuis.

« Empreinte(s) » tel est donc le nom de la nouvelle collection que Dupuis a concoctée avec passion pour enflammer les « adulescents » et se positionner de façon forte sur le marché du « genre » (S-F, fantasy, fantastique, etc.). Sur le papier, le premier titre offert à nos mirettes attaque fort : Yann, Berthet, un futur proche et une agent spéciale. À la lecture, par contre, la déception est au rendez-vous. Certes, Berthet sera toujours Berthet (tant dans ses points forts que dans ses tics graphiques) ; certes, narrativement, Yann est un conteur qui sait y faire pour mener son lecteur au fil des 48 planches. Mais le fond, par contre... S'il est un bien un genre qui a su évoluer au cours de ces dernières années c'est la S-F ; il n'y a qu'à jeter un œil sur les romans de Bordage, Wagner, Genefort ou Dantec - ou les séries de F. Duval, J.D. Morvan et D. Bajram - pour s'en convaincre. « Yoni », même si on y trouve de bonnes idées, est un récit comme on aimait en faire dans les « romans de gare » des années 60. Quelles logiques régissent cette Terre d'un futur proche ? Comment en sommes-nous arrivés là ? Comment justifier l'étrange évolution de certaines technologies ? Pourquoi tant de « sigles » ? ... Autant de questions qui ne trouvent aucune réponse dans les pages, et laissent ainsi un sentiment de placage science-fictif artificiel (d'autant plus dommage que certaines idées comme le DollyMorphing, par exemple, sont vraiment « sympa »). L'autre élément qui me laisse dubitatif à la lecture de l'album réside dans la « vulgarité » latente. Certes, une scène de « cul soft » c'est toujours sympa, encore faut-il qu'elle s'intègre à l'intrigue. Trop d'onanisme ou d'allusions scabreuses (les radiations peuvent-elles vraiment faire pousser un second clitoris ?) dénaturent le récit et dévalorisent certainement un genre qui est une mine de réflexions sur notre futur. En bref, si vous êtes un fan de S-F, ce livre n'est pas pour vous. Si vous désirez découvrir le genre, ce livre n'est pas pour vous. Si vous appréciez le travail du duo Yann/Berthet, ce livre est pour vous... en souhaitant que les quelques égarements de ce premier tome seront rectifiés dans la suite.

« Le Faune dansant » tome 1 de « Je suis légion », par Nury et Cassaday. Aux Humanoïdes Associés.

John Cassaday sera toujours une énigme pour moi. Tant j'apprécie son travail lorsque je le lis en petit format (par exemple, l'excellent tome 1 de « Planetary » chez Semic), tant ses planches, une fois publiées en grand format, me semblent froides, rigides et souvent peu agréables à regarder. Ce premier tome de « Je suis légion » ne déroge pas à l'habitude, et pourtant...
Le récit à d'entrée de jeu tout pour me plaire : une dose d'histoire, une dose de fantastique, une dose d'intrigue. Étrangement, au fil des pages, je ne peux me départir du sentiment de « déjà-vu ». Il y a ce petit côté « Échiquier du Mal » (roman incontournable de Dan Simmons... agrémenté en VF de couvertures signées Sorel, que demander de plus ?), et ce relent de « Fallen » (un film moyen de Gregory Hoblit avec Denzel Washington). Bref, le sentiment permanent en cours de lecture que l'originalité n'est pas au rendez-vous, et pourtant...
Narrativement aussi, je ronchonne au fil des pages : un peu trop de « verbiage », un faux rythme, une « intense » poursuite en vélo, etc. Et pourtant...
Et pourtant, ça marche ! A l'instar des (bons) épisodes de « X-Files » ce qui, pris séparément, fait craindre un goulache indigeste prend la forme d'un mets aux multiples saveurs. La 56e page tournée, « Je suis légion » continue de marquer les esprits ; on gamberge aux personnages, au devenir de la guerre, aux diverses formes de ce « vampirisme », etc. Bref, voilà un excellent thriller fantastique sur fond de seconde guerre mondiale, qui prouve que des éléments connus traités avec maestria peuvent encore tenir en haleine les plus blasés. Un must !
« D-Day, le jour du désastre - Les Mangeurs de vie », par Brin et Hampton. Aux Huamnoïdes Associés.

Traduction de « The Life Eaters » un graphic novel lui-même adapté d'une nouvelle, intitulée « Thor meets Captain America » (1987), de David Brin - bien connu des fans de S-F comme l'auteur de bons romans souvent primés ou « nominés » (mes préférés étant : « Au cœur de la comète », « La Jeune Fille et les clones » ou le dernier traduit « Le Peuple d'argile ») -, « D-Day, le jour du désastre » est un OVNI. Vendu pompeusement de l'autre côté de l'Atlantique comme étant l'événement le plus important en comics depuis « Watchmen » et « The Dark Knight », cet ouvrage a certainement l'ambition de ces deux illustres prédécesseurs mais n'en possède, malheureusement, pas les qualités narratives. Certes, les fondements de cette uchronie sont intéressants : que ce serait-il passé si les dieux nordiques étaient sortis de leur torpeur pour mettre le débarquement de Normandie en échec ? Tous les éléments sont en place pour un récit plaisant : des nazis, des héros, des dieux et des super-héros. Étrangement, malgré la qualité des ingrédients, la recette ne prend pas. A quoi/qui la faute ? Probablement au scénariste qui traite le récit comme une nouvelle sans s'imprégner des codes spécifiques à la bande dessinée (même nord américaine) : des longs récitatifs, des planches étouffant sous le texte, etc. (Un défaut qui se retrouve d'ailleurs souvent chez les romanciers lorsqu'ils décident de sauter le pas et de s'attaquer à la BD, ndla) Le lecteur lambda sera assez vite écœuré par tant de lourdeurs. Ce « D-Day » est-il, pour autant, à balancer sous la commode normande de grand-mère ? Non... Malgré les défauts évoqués, un lecteur de S-F assidu et prêt à fournir un certain effort de concentration y trouvera de quoi rassasier sa curiosité et titiller son imaginaire ; de même, un fan de super-héros y trouvera une conception originale des univers qui lui sont chers. Enfin, ne boudons pas notre plaisir, certaines séquences graphiques (les textes mis à part) sont impressionnantes et de toute beauté.
« Gotham Central » tome 1, par Rucka et Brubaker. Chez Semic.

Gotham City est une ville mondialement connue pour son bat-justicier. Mais connaît-on réellement Gotham City, en dehors des exploits de Batman ? Qu'en est-il de son quotidien ? de la vie des vrais flics, ceux qui ne récoltent jamais les honneurs et qui ont pourtant les deux pieds dans le caniveau ? Greg Rucka, un brillant scénariste à qui l'on doit déjà la glaciale série « Whiteout », nous offre un regard neuf sur le monde de Batman. « Gotham Central » raconte le quotidien de flics blasés, qui vivent dans une ville où les crimes les plus sordides côtoient les hauts faits d'arme d'un super-héros arrogant. Par cette série, les auteurs rendent un double hommage ; l'un à tous les sous-fifres qui vivent dans l'ombre d'un héros, l'autre aux auteurs « classiques » de polars (Hammett, Chandler, etc.). Une narration intense, qui alterne intelligemment l'action sur le terrain et les périodes de doute, soutenue par un dessin assez noir et un découpage classique, font de ce « Gotham Central » un excellent récit policier (sorte de pendant BD de séries TV telles « N.Y. City Blue » ou « C.S.I. »), accessible à tous, qui tantôt fait grincer les dents, tantôt file la nausée, mais toujours tient en haleine. Une série à suivre !
(Note : Pour les amateurs de comics, cette nouvelle série se pose comme un complément idéal au commissariat super-héroïque d'Alan Moore - « Top Ten » - ou à la série de Bendis - « Powers ». A ne pas rater, donc !)
Wolverine Snikt ! par Michael Day
« Wolverine - Snikt ! », par Tetsuo Nihei. Chez Panini Comics.

Album étrange que ce « Wolverine - Snikt ! ». Curieux de lire, dans un format franco-belge (album cartonné, grand format, couleur, etc.), les aventures d'un super-héros emblématique de la production US (Wolverine) dessinées par un mangaka (aussi auteur des séries « Blame ! » et « Noise », chez Glénat). Serait-ce là la fusion des genres tant attendue par certains ? A la lecture de cet album, bien qu'un peu court et reposant sur une seule idée - Wolverine est projeté sur une Terre futuriste pour sauver les rares survivants des griffes de créatures cybernético-mutantes (si vous avez vu « Alien » ou « Le Règne du feu », vous ne serez pas dépaysé) -, le résultat graphique est assez ennivrant pour qui aime les ambiances sombres. Le trait longiligne de Tetsuo Nihei est « monstrueusement » efficace lorsqu'il s'agit de mettre en scène la violence ou des paysages (post-)cataclysmiques. De même, la mise en couleur glaciale de Guru eFX ajoute une nouvelle dimension aux ambiances du mangaka (on se plaît à « rêver » à ce que donnerait des albums de « Blame ! » en couleurs...). Un album intéressant, mais à réserver au fans de l'auteurs, aux amateurs d'ambiances « joyeuses » et « primesautières » ou à tous ceux qui ont lu et relu leurs albums de « Requiem » (Mills & Ledroit).
« Tecumska » tome 1 de « Ethan Ringler - Agent fédéral », par Filippi et Mezzomo. Chez Dupuis.

Le western semble de nouveau à la mode et susciter de nouveaux projets appétissants. J'avoue avoir été conquis par le premier tome des aventures de ce jeune agent fédéral « malgré lui » dans les veines duquel coule du sang indien. Je suis même convaincu que cet album marque une réelle évolution dans la narration de Denis-Pierre Filippi qui, bien que très à l'aise dans les récits pour enfants, était un peu « brouillon » dès qu'il s'agissait de s'adresser à des adulescents ; ici, rien à dire, c'est carré, c'est dense, c'est intense... Les personnages ont du caractère et sont suffisamment typés pour que le lecteur « novice » soit immédiatement en empathie avec eux. Côté dessin, je suis plus dubitatif. Car, même si les décors sont bien travaillés, le trait de Mezzomo me semble toujours un peu rigide, et les cadrages souvent trop serrés à mon goût. Mais, force est de reconnaître que le tout, habillé des splendides couleurs de Nadine Thomas, offre une série prometteuse dont la suite se fait déjà attendre avec impatience.
Mystère ovale par Michael Day
« Le Mystère ovale », par Laurent Siefer. Chez Glénat.

S'il fallait décerner un prix à cet album, je lui offrirais sans hésiter celui d'Album-Concept de l'année. Bravo Monsieur Siefer, vous êtes parvenu à réaliser un exercice de style surprenant et prenant : conduire le lecteur, au fil des pages, à suivre - avec intérêt - un objet ovale dont on ne sait rien. De rencontres étranges, en situations burlesques, ledit objet passe de mains en mains et perd le lecteur dans des myriades de couleurs. C'est beau - même si les influences « mattottiennes » sont parfois trop flagrantes -, rafraîchissant et... le tout exploite bien le format (carré) si particulier de la collection. Bref, un OVNI qui se lit un peu trop vite, mais qui laisse d'excellents souvenirs surréalistes. A découvrir pour les plus curieux ou les adeptes de belles images.
Scandale à New York par Michael Day
« Scandale à New York », par Pétillon et Rochette. Chez Albin Michel.

Les superlatifs me manquent pour qualifier cette véritable leçon de bande dessinée (d'humour) que nous offre le duo Pétillon/Rochette. Si « Panique à Londres » m'avait fait sourire, ce « Scandale à New York » est certainement la meilleure « poilade » que je me suis offerte depuis... euh... trop longtemps déjà. Découpage, narration, cadrages, dessins, etc., tout concourt à faire de ce livre un petit chef d'œuvre d'esprit. Certes le propos est traité de façon excessive, mais quel plaisir de voir les deux abrutis qui servent de héros devenir les caïds de Wall Street grâce à une méthode de prédiction boursière infaillible : le doigt posé au hasard sur une page de journal ! Ce « Scandale à New York » est un peu la réponse pacifiste et gorgée de second (voire de troisième) degré de la Vieille Europe à l'impérialisme égocentrique et décadent de la Jeune Amérique. Du boycott du pinard à la valorisation de l'art moderne, rien n'est épargné... pour la plus grande douleur de nos muscles zygomatiques trop rarement mis si intensément à l'exercice. Encore !
« L'œil de Caïn » tome 2 de « Sam Lawry », par Richez et Mig. Chez Bamboo.

Relisez la chronique du tome 1 faite par mon éminent collègue, et dites-vous que ce tome 2 est bien meilleur que le précédent ! Les auteurs tiennent toutes leurs promesses : le cycle se clôt (personnellement, j'apprécie les récits en 2 tomes), le dessin de Mig a progressé, et l'intrigue, même si elle ne révolutionne pas le genre, introduit quelques moments d'émotions fortes. Si vous appréciez les récits fantastiques bien menés (à la manière du « Dead Zone » de Stephen King), cette série est pour vous. Vous y retrouverez tout ce qui fait le sel du genre : un soldat qui voit la mort de ses compagnons d'arme et qui tente de contrôler son pouvoir et d'intervenir sur le futur. En résumé, voici une série classique, bien menée... donc idéale pour qui apprécie le genre !
« Plume de sage » tome 7 de « Trolls de Troy », par Arleston et Mourier. Chez Soleil.

Triste constat... je deviens un vieux con ! Alors que, la bave aux lèvres, je m'installais dans mon canapé préféré - celui où les courbes de ma svelte personne se sont creusées au fil des ans - le dernier tome des aventures des Trolls les plus délirants de la planète BD à la main, je sentais le contentement monter en moi : le dessin de Mourier est toujours exceptionnel et les couleurs de Guth sont pareilles à elles-mêmes, excellentes. Vingt-deux minutes plus tard, la bave aux lèvres, de rage je martyrisais mon canapé préféré, frustré de devoir admettre que j'avais pris un sacré coup de vieux. Après 51 planches, plusieurs faits s'imposaient à moi. Primo, je n'ai jamais esquissé l'ombre d'un sourire en cours de lecture ! Secundo, où est passé l'humour Troll que j'appréciais tant il y a peu encore ? Les jeux de mots sont navrants (quand je les ai compris) ou... euh... inexistants. Tertio, cet album, même s'il reste graphiquement dynamique, est prétexte à accumuler gags sur gags (enfin quand je dis « gags », relisez ce qui précède...). Deux conclusions semblent donc cohérentes : soit cet album est vraiment le plus faible de la série, soit j'ai pris un tel coup de vieux que je suis devenu insensible aux Trolleries. Souhaitons pour les jeunes têtes blondes que la deuxième conclusion soit la bonne... et tant pis pour moi.

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