
« Alpha », Matière fantôme 1, par Stéphane Douay et Hugues Fléchard, Empreintes Dupuis.
« Alpha » a un mérite non négligeable. Celui de remettre sur la table le traitement de la science-fiction en bande dessinée. Beaucoup de choses ont été dites et/ou faites dans les années Pilote, par des maîtres comme Moebius, Caza, Mézières ou Druillet. Les tentatives plus récentes se limitent souvent aux genres très « cinégéniques » que sont le space opera et ses variantes hard science, ou même le cyberpunk. Beaucoup plus rares et précieuses sont les initiatives telles que « Matière fantôme ». Le principe peut paraître simple. Un homme se réveille seul dans un vaisseau désert, dépourvu de tout souvenir personnel, mais à même d'identifier tout ce qu'il voit, jusqu'au fonctionnement du vaisseau. Dans ce qui s'avère un huis clos parfait, Douay et Fléchard mettent en scène la progression physique et psychologique du personnage dans cette recherche de lui-même, et surtout de sa place dans l'immense tombeau qu'est devenu le vaisseau. Un cheminement qui le fait passer par tous les stades, du volontarisme au découragement, de l'exaltation à la folie, dans un environnement au sein duquel on finit par se demander lequel est imposé à l'autre. Un bel essai, au final noir aussi inattendu que bienvenu, sorte de version inversée, claustrophobique, quasi biologique, du « Rendez-vous avec Rama » d'Arthur C. Clarke. Lequel, de l'homme ou du vaisseau est au final l'organisme dominant ? La question reste en suspend.
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