
"Remember", de Benjamin. Editions Xiao Pan.
La porte ouverte par le manga et le manhwa, la bande dessinée chinoise (manhua) bénéficie aujourd'hui d'une voie royale. Restait à trouver les bons auteurs pour ouvrir le bal. Et là, attention les yeux ! "Remember" est un vrai festival visuel pour qui n'est pas allergique à l'effet palette graphique. Benjamin est un graphiste sous tension, chacun de ses croquis se voulant la transcription de sentiments exacerbés. "Remember" est un album composite, édité au format manga, qui réunit deux nouvelles graphiques, une trentaine d'illustrations et quelques textes. Une bonne entrée en matière pour une production qui affiche d'emblée sa dimension contemporaine. L'auteur ancre résolument ses récits et dessins dans la Chine du XXIe siècle, une Chine complètement dégraissée de son imagerie traditionnelle, impériale ou communiste. "Personne n'est capable de voler, personne n'est capable de se souvenir" et "L'été de cette année là" sont deux instantanés de la vie de jeunes artistes parlant tout à la fois d'amour et de violence, avec pour fil rouge l'incommunicabilité et la souffrance, physique ou morale. Le traitement graphique réaliste de Benjamin porte littéralement ces deux textes, sensuel et dynamique pour le premier, sombre et rugueux pour le second. Et toujours ce traitement en camaïeu de verts et de bleus presque aquatiques, traversé de fulgurances de couleurs crues avec une prédilection pour le rouge sang. Tout serait parfait n'eut été la propension de l'auteur à prendre la pose en écorché vif, véritable bad boy du crayon optique. Il y a certainement une part de vérité, mais ses dessins en parlent tellement mieux que lui...
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