Les 475 critiques de Coacho sur Bd Paradisio...

L’auteur de Titeuf, après sa Petite Poésie des saisons, nous propose un recueil de réflexions personnelles et à la limite de l’autobiographie chez Le Seuil. Imprimées sur un papier de qualité (un Lessebo 150g si mes souvenirs sont bons), les réflexions de Zep sont chapitrées en divers registres, comme au gré de ses humeurs. Le voir ainsi en couverture avec cette idée, et sachant le lien qui l’unit à Goldman, on a l’impression de lire un prolongement de la chanson « J’ai laissé des bouts de moi au creux de chaque endroit… ». Zep nous montre avec douceur et pudeur, tout en saupoudrant d’humour bien entendu, ses incompréhensions face à ce qu’est la vie et à ceux qui l’entourent… Les chapitres plus graves sont séparés par des délires sur les super-pouvoirs qu’il aimerait avoir et ces derniers permettent effectivement d’adopter le détachement relax que Philippe Chappuis, puisque c’est son nom, désire induire… Des pensées sur le monde, l’enfance, l’amour, le dessin, l’art, la famille, la célébrité, et plein d’autres thèmes traités avec la verve qu’on lui connaît… Moi, j’ai vraiment bien aimé.
Ne me demandez pas pourquoi j’aime cet auteur… Les sud-américains ont une place à part dans mon panthéon personnel, que ce soient des auteurs comme Breccia, Muñoz & Sampayo, d’autres encore, ou encore l’espagnol De Felipe, et, aujourd’hui, Zalozabal. Cet uruguayen a commencé avec un scénariste, Bayeto, en réalisant un diptyque connu sous le nom de « Du grunge en génétique » et déjà édité chez Erko. Pourtant, quand on regarde de prime abord une couverture de Zalozabal, on peut être effrayé. Couleurs criardes, muscles hypertrophiés, morphologies caricaturales, outrancières, perspectives folles, architectures improbables et pourtant… Pourtant, avec moi, ça marche à merveille ! Parce que l’ensemble de ces critères explosés forment le style de Zalozabla, et ce style me semble unique. Pour la première fois, il passe à la réalisation complète d’un album et nous livre un scénario forcément futuriste, et toujours dans un univers sombre, déjanté et un peu glauque, comme cela fut initié dans « Du grunge en génétique ». Dans une ville apocalyptique, Héroïca, où réside la population qui n’a pas été décimée par les multiples catastrophes sanitaires mondiales, nous croisons la route de Doug, flic véreux dont la chute se précipite à cause de ses douteuses fréquentations. Tout est régenté, souillé, distribué, corrompu, et malgré cela, Doug va entrevoir une issue en étant mandaté par un chef de gang pour retrouver sa nièce, victime d’un enlèvement alors qu’elle souffre de la peste baveuse. Sous un couvert finalement pas si original que ça, et avec même parfois l’utilisation de certains poncifs éculés comme celui du flic mauvais au grand cœur qui cherche la rédemption, Zalozabal va tout de même se livrer à une vision noire et peu humaniste de l’écologie, du capitalisme, des dérives de nos sociétés, et même de la pédophilie et du rapt d’enfants… C’est violent, froid, dur, et les couleurs sont là pour bien insister sur le peu d’espoir de cette drôle d’humanité qui nous est présentée… Moi, j’ai adoré, mais je ne suis pas sûr d’être totalement objectif !
Gros album avec une histoire, des croquis, des interviews, les auteurs ont voulu en donner beaucoup aux lecteurs de Mint Juleps pour tous. Stan Prozak, fidèle participant aux fora Bd et co-créateur du Fanzine Blam ! écrit là un western qui prend place dans l’après guerre de sécession. Des évènements étranges se passent en Louisiane et Dominic, Herbert et Moses, aussi différents que possible, vont s’unir à la demande du Président des Etats-Unis pour aller enquêter sur ces phénomènes… Le contexte fait immédiatement penser au Lincoln des Jouvray, une perfection selon le scénariste rencontré lors d’une sympathique séance de dédicace dans une librairie niçoise. Le dessin de Soulman, qui signe là son premier album, rappelle celui de Carali mais son trait est un peu noyé par la couleur. Lorsque l’on voit les crayonnés de fin d’album, on le regrette un peu. L’histoire s’amuse des codes westerns et on sent les influences de Stan, en particulier lors de cette séquence d’ouverture qui verra apparaître un James West des grands jours qui finira… mais, lisez donc cet album pour vous en faire une idée plus précise ! ;o)
Oh je sais bien ce qui se passe dans la tête de bon nombre de lecteurs. Lewis Trondheim, sur son nom, fera vendre tout et n’importe quoi. Je sais, nous avions eu un long débat déjà à ce sujet lorsque fut édité « Bleu » du même auteur. Oui, mais la démarche de Lewis Trondheim n’est pas mercantile, surtout lorsque l’on produit un petit bouquin de 32 pages dans la collection « Patte de mouche » à 3 € ! La démarche est donc bien ailleurs. Et cette succession de cases porte finalement bien son nom puisque le livre nous attire, et nous plonge dans la réflexion et le voyeurisme d’une autre forme de… de quoi d’ailleurs ? De sexe ? Ahah… Il y a bien un rapport effectivement… Mais ne serait-ce pas celui lié à la genèse, la conception, le berceau de l’humanité ? Cette série de treize figures ne serait-elle pas l’échographie même de ce que nous sommes ? J’y vois en tout cas plus qu’une insémination artificielle, et plus qu’une naissance simple qui se développe sous nos yeux… Oui, je vois bien plus… La naissance aussi d’une certaine vulgarisation de l’expérimental. Une autre façon de réfléchir sur ce que nous lisons, et la libre interprétation que chacun peut en faire. En ces temps de production de masse, ça fait du bien…
Moi je par Coacho
Attention, ne pas confondre ce petit livre rouge avec celui de Mao ! Point de révolution de fond mais bien une guerre personnelle, interne, du personnage central de cette autobiographie faite de petits moments innocents et fugaces . Le livre est très aéré, et le dessin épuré. Ces saynètes nous montrent les tourments d’une fille qui alterne questions existentielles avec futilités absolues. C’est séduisant, drôle, fin, et, même si c’est plutôt un livre de fille, il n’en est pas moins recommandé aux garçons pour mieux comprendre les sautes d’humeur et préoccupations de nos douces compagnes.
Tour de France par Coacho
Non, ne partez pas ! Il ne s’agit pas de parler ici de l’album scénarisé (?) par Laurent Jalabert ! Que nenni ! Même s’il s’agit bel et bien d’un tour de France ! Mais il sera fait en voiture, pas en vélo, par Frezzato, le brillant auteur des « Gardiens du Maser », accompagné de sa compagne Elo. Invité par Féfé, son éditeur des Editions USA, à une tournée de dédicaces à Paris et en Province, Massimiliano va découvrir une facette cachée du phénomène de la dédicace que l’on trouve dans les contrées franco-belges. Peu habitué à ces queues hagardes, patientes, ou parfois plus dissipées, se prêtant à l’exercice du dessin et de la concentration que ça exige tout en sortant de sa bulle pour paraître aimable, Frezzato nous titille dans nos travers qu’il croirait presque français ! En tout cas, en petits chapitres, l’auteur nous offre des pages que je trouve superbes avec ce trait gras et rond qui le caractérise, et nous montre l’ironie de ce voyage usant qui ne lui a pas laissé beaucoup de temps pour découvrir cette partie de la France. Des photos montages, des couleurs, du mat, de la peinture, des réflexions, vraiment un agréable moment d’évasion et de sourire…
Il est des albums simplement beaux. Pas du point de vue uniquement graphique, non plus uniquement du côté scénaristique, mais bien un ensemble, une alchimie subtile qui se crée et nous offre toutes ses fragrances pour un bonheur de lecture. Peyraud nous offre ainsi une histoire loin de ses habituelles chroniques contemporaines mais pourtant, on retrouve sa patte inimitable pour décrire l’indescriptible et nous faire passer des sentiments complexes avec maestria. Alfred, quant à lui, nous offre ses arabesques magiques, ses décors théâtraux, ses architectures sublimes, grâce à un trait envoûtant. Les inspirations, pour l’un comme pour l’autre, proviennent de l’onirisme et de lectures romantiques. Une scène entre Josef et Vespérine (qui ressemble drôlement à Marilou, l’héroïne dessinée par Capucine sur scénario d’Olivier Ka, remercié en début d’album est-ce un hasard ?) n’est pas sans rappeler des positions précises de Frederik Peeters dans les Pilules Bleues ou dans Onomatopées. Les amours contrariées, les amours impossibles, les amours physiques, le tout sous fond de révolution dans un pays imaginaire que l’on pressent slave, les frustrations et rebellions, les spectres de la guerre, tout est là, habilement mélangé, savamment dosé, pour faire de votre lecture un parfait roman de genre enthousiasmant. Frisson, érotisme, aventure, fougue, violence, et personnages charismatiques, voilà ce qui vous est proposé dans ce premier tome de ce qui deviendra assurément une grande saga.
Alerté par divers commentaires du forum au sujet de cet album que je n’avais pas spécialement envie de lire, j’ai fini par succomber pour assouvir ma curiosité. Car les reproches communément adressés à cet album, Astraban, sont essentiellement basés sur l’approche Disney des personnages. Et je dois avouer que la couverture semble bel et bien inspirée du Robin des Bois qui berça mon enfance ! Cet album va inévitablement souffrir de la comparaison avec le Roi Blacksad et avec tout autre dessin animé d’aventure. En effet, là où Blacksad prend le temps one-shot après one-shot de développer une narration posée et réfléchie, les auteurs de La Guilde ont mis le turbo. C’est mené tambour battant et ça part dans tous les sens, avec plus ou moins de réussite, mais ils ont vraiment des difficultés à s’affranchir des codes de la maison Disney (l’effondrement d’Astraban puis la page 25 qui nous offre 9 poses de « savoir-faire made in » sont assez révélatrices de cet état). Les cases sont souvent ou trop vides, ou trop empreintes de ces affreux effets floutés de photoshop, mais il n’en reste pas moins de superbes cadrages et des cases magnifiques, des regards incroyablement expressifs et une violence sanguinaire qui tranche vraiment avec le monde de l’enfance. L’histoire reste cependant trop alambiquée et un peu confuse, les sentiments sont assez contradictoires (mais il y a de très bonnes pistes pourtant, en particulier avec l’utilisation de techniques mafieuses dans l’appropriation du désemparé), et on ne sait jamais comment prendre celle-ci. Est-ce drôle ? Violent ? Recherché ? Léger ? Course-poursuite ? Je suis d’accord que c’est un album de mise en place et c’est pourquoi je resterai indulgent et que j’attendrai de voir le second volume pour me faire une idée plus précise.
Et voilà encore un album à la gloire du talent de Matthieu Bonhomme. Après nous avoir bluffé avec « L’âge de raison », puis enthousiasmé avec « Le Marquis d’Anaon » (scénarisé par Fabien Vehlmann) et plu avec « Le voyage d’Esteban », le voilà aux dessins d’une histoire scénarisée par Gwen de Bonneval (Gilgamesh entre autres). Cette histoire moyenâgeuse emprunte des chemins assez classiques de protectorat, richesse, guerre et remariage, mais laisse planer une légère odeur de surnaturel qui, contrairement à ce que l’on ressent souvent, n’est pas encore un Deus ex-machina de facilité. En effet, les croyances celtes, la magie qui oscille entre vrai fantastique et remède de rebouteux, a bien sa place dans cet album qui fait la part belle à l’héroïsme d’enfants de fort caractère bien décidés à retrouver la trace de leur père disparu et considéré comme mort. Chemin faisant, un soudard au cœur noble accompagnera Guillaume sur ce long chemin initiatique qui lui est proposé par sa tante. Des planches somptueuses, des points de vue magnifiques, on sent aussi le vent, le froid, les odeurs, l’ambiance. Il faut ici souligner, comme le faisait Hervé par ailleurs, le superbe travail de Walter pour les couleurs car tout son travail dépasse maintenant le simple cadre de la colorisation pour vraiment plonger le lecteur dans un sentiment évocateur fort. Bravo aux auteurs qui nous laisse dans une intenable attente à la fin de cet épisode. Argh !
Morlac par Coacho
Amateurs de BD étrange, torturée et travaillée, vous allez être servis. Dans un monde Kafkaïen que ne renierait pas Marc-Antoine Mathieu, Leif Tande, talentueux auteur québecois, laisse éclater toute son ingéniosité dans cet exercice que nous pourrions considérer comme Oubapien. En effet, ce tentaculaire récit se développe sous nos yeux médusés et, ce labyrinthe, ou plutôt ce jeu de piste, est d’une incroyable pertinence et un modèle de maîtrise. Nous suivons un personnage avec sa valise dans un dédale de couloirs et chaque possibilité de chemin est étudiée en démultipliant le récit. Un peu perturbé au début, puis même perdu, il faut faire œuvre de concentration pour profiter pleinement du récit. Et puis, la magie opère. On comprend le mécanisme du livre, on trouve les clés de l’auteur et tout devient limpide et magistral. De la grande bande dessinée qui fait réfléchir, qui intrigue, qui coupe le souffle car techniquement et narrativement (permettez moi ce pléonasme), c’est ébouriffant !
Suis-je objectif dès lors qu’il faut parler d’Emmanuel Guibert ? Sûrement pas… Mais objectivement, son oeuvre entière force le respect. Touche à tout graphique, traitant de tous les sujets et tous les univers, ce passionnant passionné nous entraîne dans cette série de 3 tomes à la découverte de l’éprouvant voyage en Afghanistan de son ami Didier Lefèvre. Celui-ci, photographe reporter, décida d’aller pratiquer son métier en se jouxtant à une mission de MSF qui allait le conduire à la découverte de ce pays en guerre contre l’oppressant régime soviétique. Habile et subtil mélange de dessin minimalistes et de photos prises par Didier Lefèvre, ces albums sont la preuve éclatante du talent de conteur d’histoire qu’est Emmanuel Guibert. L’alchimie délicate des 2 arts qui nous sont proposés fonctionnent à merveille et on sent très ostensiblement la force du récit et la douleur ressentie par la simple force du dessin. C’est puissant, beau, et nous emmène aux confins de la folie lors de ce voyage de retour que le photographe veut effectuer seul pour aller plus vite. Epuisé, affamé, racketté, au bord de l’évanouissement, malade, livré à lui-même dans un pays qui lui est devenu hostile, Didier va tout haïr, à commencer par lui-même, dans cette randonnée périlleuse qui lui permettra d’apprendre à se connaître. C’est sublime, tout simplement. Dans l’euphorie de son départ jusque dans sa lente agonie au milieu de la neige de ce col perché à plusieurs milliers de mètres d’altitude, lorsqu’il perd tout contrôle et cède à la presque folie, l’album devient oppressant, et usant pour le lecteur. Je vous laisse découvrir le dénouement de cette incroyable aventure vécue, bien réelle, qui aura eu des conséquences sanitaires importantes pour Didier Lefèvre. L’appendice de ce dernier opus nous offre 4 pages sur le devenir des différents protagonistes rencontrés durant ce périple et un Dvd de 40 mn réalisé par Juliette Fournot. Ce documentaire, choc, est un parfait complément au triptyque formidable que les auteurs nous ont offert. La vidéo, la photo, le dessin… Un cocktail fou qui nous révèle d’incroyables saveurs. A lire d’urgence chez Dupuis, dans la collection Aire Libre.
Un coup de coeur, un vrai. Est-ce lié au fait que la proximité de ma résidence avec l’Italie ait pu avoir une forte résonance ? Non… Je crois que ce livre tient très bien en haleine n’importe quel lecteur grâce à son ingéniosité et au talent des auteurs Cet album de 136 pages se découpe en 12 chapitres qui illustrent chacun avec brio les divers paragraphes d’une lettre dont vous comprendrez qui est l’auteur et à qui elle s’adresse. La construction est toujours la même. On y voit Erminio, Instituteur milanais d’un village de Sicile, qui va quitter définitivement ce dernier. Chaque parole, chaque parfum, chaque vision, le replonge dans son Italie des années 50 et c’est brillamment amené. En douceur, nous ripons d’une situation actuelle pour nous glisser dans ces temps déjà lointain pour les jeunes générations que nous sommes. Dans cette histoire, les auteurs vont nous parler de racisme, mais le racisme provincial, et si particulier, que l’on trouve entre les provinces italiennes. Ils vont aussi nous parler d’amour, d’adultère, de violence, celle du patriarcat, de handicap, et de toutes les choses de la vie. Et tout ça avec facilité, grâce, force. Les moments de farniente et de bonheur tranchent avec les situations fortes et critiques. Ne confondez pas Erminio le Milanais avec Don Camillo à cause de son Maire Communiste Battista et de son Curé Don Giorgio ! C’est cependant tout aussi tendre… Je ne connaissais rien d’Erwann Surcouf mais son dessin fait mouche, immédiatement. Des noirs et blancs et une façon de faire qui rappellent parfois le Götting de « La malle Sanderson », mais ça serait réducteur de le confiner à une parenté. Son noir et blanc fait ressortir une certaine dramaturgie et une fidélité à une époque révolue et compense ainsi ce que la couleur aurait amené de la chaleur accablante qui sévit dans les contrées siciliennes. Un album magnifique, touchant, émouvant, que je vous recommande chaudement.
Lointain par Coacho
Etrange petit album à la couverture captivante. Tout en bichromie, cela n’est pas sa seule spécificité. Cet album est aussi muet. L’exercice est donc périlleux mais Claude Desmedt s’en tire haut la main. En effet, l’auteur va nous offrir, durant près de 70 pages, un cycle de vie dont la cruauté et l’humanisme sont les 2 sentiments contradictoires principaux. Nous découvrons un homme dans les bois d’une plaine, a demi-nu, et que l’on découvre rapidement comme étant aussi demi-sauvage. Libre comme un animal, il se soumet à ses pulsions. Il se lave, et tente de se nourrir. Mais un accident le blesse gravement à un poignet et, perdant connaissance, il se sent récupéré durant son délire infectieux. De là va commencer une renaissance pour lui mais conjointement à de la soumission… Je ne vous en dis pas plus pour ne pas déflorer le fond du sujet mais sachez que c’est entre résignation et lutte, solitude et compagnie, torture et bien être, sauvetage et emprisonnement, bref, toujours sur une ligne qui pourrait sembler très marquée mais qui n’est finalement qu’une frontière mouvante entre l’acceptable et l’inacceptable… A découvrir…
Quand l’auteur du cultissime Ripple s’attaque aux déficiences de l’adolescence. Les 5 chapitres qui composent cet album suintent de toute la frustration et de l’éclosion du désir que rencontre chaque adolescent au moment de sa puberté. Des désirs confus, des visions obsessionnelles, une envie permanente de plaisir, et des excès de sébum. Si ça devait s’arrêter là, nul doute que ça aurait pu être traité de façon politiquement correcte mais c’était mal connaître Dave Cooper. Avec le ton qui le caractérise, il va nous faire entrer dans ce monde brut, sale, souvent répugnant, tout en suscitant notre (malsaine ?) curiosité de voir où il veut en venir. Et il poussera cela assez loin, jusqu’au point de rejet ultime que l’on ressent lorsqu’il aborde le délicat problème de la pédophilie exercée sur de naïfs individus. Cet album a-t-il été conçu pour choquer ou pour nous faire réfléchir sur les fondements de notre société et notre morale ? Jouant des réflexes de culpabilité et de culpabilisation, il pose des questions, nous les livre brutalement et nous secoue de façon assez radicale. Le but n’est pas de faire un album polémique ni de réaliser un quelconque tour de force dans le monde du comix underground américain, le but n’est pas de faire de cet album la référence en la matière, le but n’est pas de s’affranchir de quoi que ce soit, ou de l’influence de qui que ce soit, mais cet album sonne comme une évidence de ce que la bande-dessinée peut servir comme vecteur d’expression. A ne pas mettre en toutes les mains…
Depuis l’arrivée de Morvan et Munuera aux commandes de la série mère, Spirou a repris du poil de la bête et, sous l’impulsion de la direction éditoriale de Dupuis, Spirou se voit offrir d’improbables one-shots de la part d’auteurs divers comme Tarrin & Yann, Frank Le Gall et, ceux d’aujourd’hui, Yoann & Vehlmann. Tout d’abord, l’album. Il est en grand format, le cinémascope de l’aventure en BD. Il est volumineux puisqu’il comporte 62 pages. Les cases sont larges, aérées, les planches ont l’air pleines de vie. Les 2 auteurs sont de vrais amis et leur collaboration fusionnelle se ressent durant la lecture, assez rapide il faut avouer, de cette première aventure « à part » du groom. Oui, mais qu’est-ce qu’elle raconte cette histoire ? Et bien il y est vaguement question de scientifiques Indiana Jonesiens qui découvrent une statue gigantesque qui semble provenir d’une antique civilisation. Voilà. C’est un peu court mais pourtant, ils arrivent à nous faire galoper pendant les 62 pages de l’album pour nous emmener vers un Jurassic Park que l’on appréciera plutôt modérément. Qu’est-ce qui fonctionne dans ce livre et qu’est-ce qui fonctionne moins bien ? Je ne suis pas Gardien du Temple de l’esprit, du Mythe, de Spirou. J’ai comme tous les gens de mon âge une grande tendresse pour les Spirou de Franquin, de l’époque du « Repaire de la murène » , dont le sous-marin est utilisé dans ce nouvel épisode, ou de « L’abbaye truquée », mais je ne suis pas figé dans une posture définitive et négative concernant le personnage phare de Dupuis. On sent d’ailleurs chez les auteurs une grande tendresse pour le groom et l’évolution qu’ils vont apporter aux personnages de la série sera purement affective. Graphiquement, je n’ai rien à reprocher à Yoann. Son dessin est dynamique, impeccable et aussi aéré que lisible. J’ai particulièrement aimé ce qui ne plaît pas à tout le monde, c’est-à-dire le relooking des personnages, et, in extenso, leur caractérisation plus affirmée. Spirou est plus dans l’air du temps et porte des fringues de son époque, il est bagarreur, rieur, joueur, charmeur même… Fantasio est devenu une sorte de dandy moins gaffeur et naïf, plus posé et réfléchi, moins net dans son amitié avec Spirou… Champignac est définitivement l’aristocrate fou et brillant avec ce look noble et, ça fait du bien de le dire, mais on entr’aperçoit un Zorglub peu de fois mais assez pour profiter de l’aura de son charisme de papier… Spip est moins mis en avant, un peu plus bâclé, dommage… Pour ce qui est du déroulement de l’aventure, et bien Fabien Vehlmann nous offre un cocktail détonnant qui allie plaisir et action avec ce soupçon d’humour qui permet de passer un agréable moment. Il profite de Martin pour faire passer des rires et des émotions, le transformant en Sganarelle de l’aventure, et il place quelques références cinématographiques dont une très forte pour le Seigneur des Anneaux (je ris encore du « Pour le Gondor et le Rohan » !). En conclusion, l’aventure est vite lue, pas exceptionnelle, mais le phénomène est ailleurs. Nous sommes forcément plus critiques mais Yoann et Vehlmann ont eu la difficile tâche d’essuyer les plâtres et d’être les premiers en lice sur le tourniquet casse-gueule de ces reprises sous forme d’aventures uniques. Je suis donc partagé entre plaisir visuel et fond de l’aventure… Mais essayez-le quand même… Moi, j’encourage le tout !
Et voilà le dernier tome de l’incroyable aventure de Benjamin Tartouche (pas celui des Casinos !) dans l’anti-chambre de la Mort. Car il n’en voit pas le bout de son purgatoire le Benjamin… Et pourtant, les dernières révélations lues dans le tome 2 vont trouver leur place dans le déroulement de ce dernier album et conduire à la solution finale qui mettra fin à l’errance de ce pauvre hère. Cet album se lit comme on écoute « La légende Jimmy » de Souchon et cela deviendra une évidence pour vous après avoir terminé ce joli album à la couverture partiellement vernie qui donne un superbe effet. Comme à son habitude, Chabouté place ses personnages dans une histoire sombre, légèrement ironique, et nous offre une ambiance enivrante. Jouant sur la couleur de la vie et le noir et blanc de la mort, il créé des peuples dont on ne sait pas lesquels s’ennuient le plus… C’est beau mais ça se lit rapidement et aurait pu peut-être se dérouler en 2 tomes ? Prendre le temps de placer un récit dans la durée est intéressant mais peut-être faut-il parfois faire plus léger, c’est ce que j’ai un peu ressenti en lisant cette fin en tout cas… Quoi qu’il en soit, un dessinateur aussi doué que Chabouté mérite d’être lu et rien que pour le plaisir de voir le fantôme de Gainsbourg se promener dans les pages de cet album, il mérite d’être lu !
Attention, gens sérieux s’abstenir ! Là, on est embarqués dans la suite des aventures de ces joyeux pirates découverts dans « Mon nom est Capitaine ». Ce dernier est un peu mis de côté pour mettre la lumière sur Romuald, incroyable second lieutenant, qui a décidé de prendre en charge la recherche des trésors de ces neuf cartes découvertes dans le tome 1 et dont le Capitaine semble compromettre la récolte. Le délire est à toutes les pages, avec des références pour tout le monde, tous les âges, et entre les courses poursuites du Capitaine Charles qui veut récupérer son bateau et les mystères entretenus autour de la femme du Capitaine (car tel est son nom), les zombies, les scènes folles, les gags non-sensiques, les cases muettes avec ce crâne qui vole, ces gros yeux… Tout est un délice ! Le dessin de Salsedo est toujours aussi original et chatoyant, les couleurs directes superbes et Nicolas Pothier, le collaborateur de BoDoï, se lâche dans le délire potache le plus communicatif. Un vrai cartoon qui passe de la pluie au beau temps et qui réchauffera, à n’en pas douter, vos zygomatiques !
Nous avions laissé Lincoln à un Carrefour en train de faire la circulation. Nous le retrouvons quelques années plus tard, ayant pris du galon et du poids, en inspecteur de police corrompu. Quand on connaît le personnage depuis ses débuts, c’est bien quelque chose qui ne choque pas. Mais Dieu a décidé de reprendre en main sa brebis et va lui imposer un parcours et un challenge. Ainsi, Lincoln sera destitué, incarcéré, molesté et abandonné dans un cachot avant de prendre la fuite avec une improbable bande tous enchaînés. Ce tome 4 est un vrai plaisir dans le sens où la famille Jouvray ne s’est pas enferrée dans un maniérisme et un savoir-faire qui auraient pu les conduire à répéter à l’envie les mêmes mécanismes narratifs qui avaient fait les succès des précédents opus. Le fond même de l’histoire reste inchangé puisqu’on continue à observer les enjeux misés sur Lincoln par Dieu et le Diable, mais le déroulement des aventures reste toujours frais et original. On savoure avec toujours autant de délectation le trait de Jérôme et les couleurs d’Anne-Claire, ainsi que les jubilatoires traits d’esprit qu’Olivier s’applique à faire passer en dynamitant la pensée judéo-chrétienne classique. C’est fait avec grand humour et on ne se lasse pas de voir étalés ainsi les corruptions, critiques et irrévérences qu’il nous livre dans son dernier scénario. Jusqu’au point cynique où la volonté du Diable rejoint celle de Dieu et que tout se déroule dans un « t’es pas cap » alcoolisé hilarant (la gouille bolle, wahaha, j’en ris encore !) ! A noter quelques erreurs orthographiques comme la case 4 de la page 32 et un pluriel oublié, ou encore case 5 page 38 ou case 7 page 41 avec l’oubli de formes négatives) mais l’ensemble est de qualité bien supérieure à l’ensemble de la production habituelle et ça mérite d’être souligné, applaudi, et peut-être même mériter l’érection d’une statue ! ;o) A lire, forcément !
Voilà une association prometteuse. Le scénariste de Zoo et la fabuleuse dessinatrice de Fées et Tendres Automates réunis pour nous livrer un conte de Noël un peu spécial. C’est ainsi que nous partons à la découverte de Georges et de M. Claus, 2 hommes que la vie n’a pas épargnés et qui vont se rencontrer dans des circonstances un peu particulières. Jouant sur la sensibilité à fleur de peau des personnages, insistant sur la douce folie de l’un et l’extrême culpabilité de l’autre, Bonifay va nous conduire dans une histoire extraordinaire dont l’issue est improbable. Le trait de Béatrice Tillier est toujours aussi féerique, plein de poésie, de grâce, les cadrages sont beaux, les couleurs chatoyantes et chaudes, et elle fait ressortir les moments crus et difficiles avec beaucoup d’à propos. Malheureusement, les ressorts narratifs ne parviennent pas à faire décoller le lecteur et, malgré le réel potentiel de l’histoire et le brio de son traitement, on ne fait que regarder cet album sans vraiment y pénétrer. C’est un peu dommage de faire ainsi ressortir des sentiments forts et rendre ces personnage si peu attachants. Je reste sur ma faim.
Cet album a vu ses planches pré-publiées dans Spirou et je pense que c’est un élément d’importance. Un rythme de parution régulier permet de faire mieux passer le gag alors que là, pour le coup, j’ai trouvé cela assez copieux et limite indigeste à lire en un bloc. Quoi qu’il en soit, Jenny et Vicky sont bien les 2 pestes adolescentes égocentriques qui tiennent l’album par leur superficialité et leur cruauté et c’est par Karine, leur faire-valoir et souffre-douleur, que l’émotion passe. Le beau Dan a su le voir… Mais même si je n’accroche pas spécialement à ce type d’humour qui tient beaucoup dans la surenchère, il faut reconnaître l’acidité de Dubuc comme une qualité en l’occurrence ! Delaf sert le tout d’un dessin fin qui fait penser, pour certaines courbes, à un Kiraz, et donne à son univers un environnement de bonbon acidulé qui correspond bien au ton de l’album. A vous de vous faire une idée…
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