
Thérèse, de Jean-Philippe Stassen, dans la collection Aire Libre, chez Dupuis.
Ceux qui aiment Stassen achèteront « Thérèse » les yeux fermés. Il n'y a pas de raison de bouder son plaisir. Et ceux qui ne le connaissent pas encore ou ne sont pas convaincus seraient bien inspirés de faire la même chose ! Ce « Thérèse » est un conte superbe sur la différence, le regard des autres, la naïveté et la méchanceté, la beauté et la laideur, l'Afrique et l'amour.
En s'entichant de Momo, Thérèse ne sait pas encore que sa vie va basculer. Elle est laide, grosse, tout le monde se moque d'elle. Mais elle va se découvrir un pouvoir, celui de matérialiser ses visions. C'est sans doute pour ça que Momo, jeune garçon sec et coupant comme le verre, va finir par la suivre. Pour ça, et pour l'argent aussi, cet argent qui ne cesse de filer entre les doigts des deux « amoureux ».
Départ pour l'Afrique.
L'Afrique. L'imprévu. Et surtout, les canons de la beauté qui s'évaporent. Plus le voyage avance vers d'improbables dénouements, plus Thérèse devient belle. Sa silhouette s'affine. Celle de Momo, méchant, buveur, égoïste, voire égocentrique, prend en revanche le tour inverse. Stassen semble prendre un malin plaisir à se venger de la noirceur de ce personnage, qu'il avoue être tout ce qu'il déteste en lui. Il l'enlaidit, et même, il le fait disparaître sans aucune pitié.
Il y a de la fausse naïveté dans cet album. De l'amour aussi. Plein d'amour. Du beau, du grand. Du grave. Il y a des personnages secondaires attachants, une héroïne qui embellit à vue d'oeil, une morale amorale, des gens qui sonnent juste dans une histoire qui est pourtant un conte. Le mélange produit un effet saisissant. On ne referme pas « Thérèse » sans se poser quelques questions. On ne referme pas « Thérèse » sans y repenser, de loin en loin, comme une histoire qu'on vous aurait racontée et qui vous aurait touché. En plein coeur.
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