
« Souvenir d'une journée parfaite », par Dominique Goblet. Chez Fréon.
Après deux collectifs et deux albums solo, voici le cinquième titre de la collection « Récits de ville » qui rend compte des travaux réalisés en atelier international par les éditions Fréon durant les années 99 et 2000. Derrière une couverture quelque peu austère évoquant la tristesse dans la désolation, le lecteur trouvera une étrange histoire où fiction et autobiographie se nourrissent l'une l'autre pour un échange sur la mort et le souvenir. Tout cela peut sembler très noir. Mais Dominique Goblet a un tel talent de dessinatrice que son cimetière ucclois (une banlieue de Bruxelles) résonne de silences méditatifs et de chants d'oiseaux. A aucun moment, le lecteur n'a le sentiment d'assister, complice, à une complaisante promiscuité avec la mort. Pourtant, Dominique Goblet ne parle de rien d'autre, ou presque. Elle arrive, aidée par les textes de son complice Guy Marc Hinant, à n'en parler qu'à travers la vie. Et même à ne nous parler vraiment que de la vie. Son dessin est tantôt envoûtant tantôt spectaculaire. Quelle incroyable vivacité dans cette scène de cortège funèbre sous la pluie ou dans ce vol d'étourneaux qu'elle a observé en octobre 2000 avant de le « figer » sur la feuille. Le crayon gras semble courir sur le papier, et la minute suivante, y glisser tout en longueur, comme une feuille morte emportée par une brise légère. Dominique Goblet y ajoute une bichromie légère qui s'exprime dans des nuances jaunes (comme sur la couverture) obtenues en salissant le papier à l'aide de corps gras. Le résultat est magnifique, aussi magnifique que ces histoires parallèles tressées pour n'en retenir que le souvenir d'une journée parfaite.
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