Les 475 critiques de Coacho sur Bd Paradisio...

Les Editions Groinge, petite structure domiciliée sous le soleil niçois, a eu la bonne idée de reprendre les tomes 1 à 4 des oeuvres autoéditées de Bsk. D’un dessin léger qui va à l’essentiel, on se rapprocherait presque du dessin de presse. Mais d’une presse du quotidien de la vie, de l’adolescence, de l’enfance. Par petites touches plus ou moins habiles, Bsk va nous faire part de ses réflexions, ses aphorismes, ses anecdotes, tantôt vues de l’adulte, tantôt vues de l’enfant, quand ce n’est pas le rebelle adolescent qui s’exprime ! L’album est assez inégal mais somme toute comme chacune de nos humeurs.
Il était attendu au tournant celui-là, après avoir joué avec les lecteurs lors du premier tome. Prenant compte des avis glanés ci et là, Michel Falardeau a refait sa couverture du tome 1, ce qui était vraiment nécessaire, et a recomposé son bandeau titre pour le rendre plus attractif. En fin de compte, le résultat est probant et ce deuxième tome nous offre une couverture assez efficace, bien que discutable sur le choix de ces couleurs que je qualifierais de… voyantes ! Mais comme nous avons su passer sur l’ancienne couverture du tome 1 pour mieux déguster le récit, passons sur la deuxième. Ce qui avait fait le charme de « Lydia », c’était cette espèce de complicité installée entre le personnage et le lecteur et l’interaction même de cette connivence qui nous rendait compagnon de chaque soubresaut de sa vie. Et la présence de son père. Et bien je suis obligé de reconnaître que cela fonctionne beaucoup moins bien dans « Initiation ». L’auteur n’a pas réussi à continuer sur le même registre avec autant de justesse et cela devient un peu lourd, pesant, désordonné. Les mystères qui entourent le personnage de Lydia sont nébuleux et même si on ne recherche pas la clarté absolue, on s’y perd tant tout cela confus. L’unité de temps n’est clairement pas défini et on passe plusieurs pages sur une journée et avec une autre, on saute un an, ce qui créé une rupture dans la fluidité de la lecture un peu dérangeante. On a l’impression que le support devient un prétexte à mettre quelques situations plus ou moins intéressantes sans que cela serve en quelque point que ce soit l’histoire. Il y a des amitiés, des jalousies, des chamailleries de collégiennes, et on attend cette « initiation » qui sert de titre à l’album pour enfin voir arriver le byzuthage de la mort qui tue sur les dernières pages… Et je vous laisse vous faire votre avis sur cet exceptionnel moment… Hmmm… Non, franchement, il va falloir relancer l’intrigue autrement qu’en soulignant les étonnantes capacités physiques de Lydia et en plaçant un coup de téléphone du père pour me garder comme lecteur. Le dessin est étrange lui aussi. Parfois un peu effacé, comme si la retouche informatique, ou l’impression chez l’éditeur, avait un peu happé du trait… L’absence marquante de décors, qui pourtant ne gênait pas la lecture du premier opus, se révèle ici plus pénalisante du fait que les récitatifs soient moins captivants. On note aussi quelques tics mangas et d’autres perspectives un peu hasardeuses. Oui, quand le charme n’agit plus, on devient plus critique, c’est évident… Cependant, et parce que je garde en tête l’excellente surprise que fut « Lydia », et parce que j’espère quelque chose de différent pour le 3° tome, un truc qui me surprenne de nouveau, je vais mettre 3 étoiles. Mais intrinsèquement, ça vaut moins à mes yeux pourtant souvent indulgents… En attendais-je trop ?... Peut-être… A suivre…
« La chasse » clôt le diptyque de Pécau et Pahek qui ont adapté l’oeuvre d’Herman Melville. Intelligemment, Pécau, connu pour son travail sur les séries « Arcanes », a transposé l’univers marin de Moby Dick dans un univers spatial pour une grande épopée. Reste que cette adaptation souffre de la comparaison avec l’oeuvre originale et que l’on ne ressent pas le souffle épique de la traque du Capitaine Achab, ni même les frissons ou les embruns qui fouettaient notre visage plongé dans les pages de ce roman incroyable. Peut-être le temps a fait son oeuvre et que je suis moins réceptif à la tentative de Pécau ? Quoi qu’il en soit, il y a de très bonnes trouvailles dans ces 2 albums, la première étant d’avoir remplacé les cétacés par des comètes chargées de minerai que des harponneurs cherchent à attraper pour s’enrichir. D’autres parsèment cet album mais malheureusement, nous n’arrivons pas à vraiment nous attacher au moindre des personnages qui nous sont présentés et cela plombe un peu le récit. Pour les amateurs de science-fiction, il y a le travail de Pahek à prendre en considération. Cet auteur croate nous livre des planches somptueuses, parfois cadrées rapidement, parfois prenant une double page, il se fait plaisir et nous transporte dans l’immensité de cet espace qui sert de territoire de chasse à des néo-marins bien courageux et, comme pour renforcer l’impression de tournis des chasses aux comètes, change souvent l’orientation de son découpage et de la disposition de ses cases. Bref, ces 2 albums peuvent être une agréable découverte mais il manque indéniablement un petit quelque chose pour la faire sortir d’un certain anonymat. A vous de voir…
Ce tome vient clore ce diptyque magistralement commencé en avril 2004 par Franck Bourgeron, qui signait alors son premier album dans la collection « Equinoxe » de Vents d’Ouest, et qui se voyait ainsi nominé à Angoulême pour celui-ci. Après nous avoir didactiquement promenés dans l’histoire communiste de la Chine, l’auteur se recentre un peu sur ses personnages et plus particulièrement sur Li-Fuzhi que l’on avait laissé dépossédé de ses idéaux… Dans une ferme perdue au milieu de la province du Shanxi, il purge une mise à l’écart du Parti Communiste et tente de se reconstruire auprès de la femme que le parti lui a désigné. Mais bientôt, Kang Shen, habile politique dont la carrière mena à de très hautes responsabilités, et qui fut le mentor de Li-Fuzhi, va venir perturber cette relative quiétude en imposant la garde d’un personnage subversif dans la ferme dirigée par Li-Fuzhi. Cet acte particulièrement manichéen, dont je vous laisse découvrir la saveur, conduira Li-Fuzhi à perdre encore plus que ses idéaux… Dans un écrin magnifique à la couverture superbe et partiellement vernie, les 64 planches de Franck Bourgeron explosent de beauté. Régulièrement, pour imprimer une profonde notion de temps et d’espace, et aussi pour le plaisir de se rapprocher des estampes ou cartouches chinois, l’auteur nous livre des pages découpées verticalement du plus bel effet. Il prend le temps de narrer, gérant parfaitement les silences qui disent tant, et laisse le lecteur s’imprégner des couleurs, des saveurs, et des rapports complexes qui interagissent sur ces êtres dépersonnalisés par un système dont ils ont pourtant été acteurs, même si ce fut par obligation. Le dessin est brut, faits de nombreux traits qui ne sont pas sans rappeler ce que l’on peut admirer chez Blain par exemple, et donne une nervosité palpable au récit. Enfin, son travail dans le dessin animé se ressent notamment sur la fluidité des mouvements imprimés aux personnages, et cela donne un ensemble vraiment magnifique. Voilà un diptyque que je vous encourage vivement à découvrir tant il est pétri de qualité.
Je l’ai attendu ce tome 3, oh oui ! Je n’ai eu à me mettre sous la dent que la parution de l’intégrale en N&B de Némo pour pouvoir assouvir ma soif de Brüno. Et enfin, le tome 3 d’Inner City Blues arrivait ! Qu’en dire de véritablement objectif ? Ben… Pas grand chose tant mon avis est subjectif ! Si vous aimez les histoires blacks des seventies, l’ambiance Starsky & Hutch, ou celle des « Funky Cops », Huggy les bons tuyaux, la came, la musique d’Aretha Franklin, de Nina Simone, d’Oke & Tina Turner, de Jay Hawkins, les papiers-peints psychédélique, le flower power, les Village People, la lumière des boules à facette, l’art contemporain, les grosses voitures carrées, la baston, les coups de feu et les entourloupes, Inner City Blues est fait pour vous ! Ce 3° tome se recentre sur Yaphet Kotto, membre d’une organisation du crime qui veut le mettre sur la touche pour ses mauvais résultats. C’est un peu moins speedé que le tome 2 mais on prend un vrai plaisir à retrouver cet univers de malfrats qui nous sont pourtant sympathiques… Arnie & Willy sont aussi moins présents mais ils vont avoir à porter le rebondissement final que nous attendons tous… A vous de lire ! En tout cas, si la série ralentit un peu, elle n’en reste pas moins passionnante par d’abord un graphisme unique qui caractérise le trait de Brüno, puis par un sympathique cours d’Art contemporain qui arrive didactiquement, sans casser l’intrigue, à prendre 4 planches (12 à 15) et à nous parler de Maurice Dupré, et enfin parce que l’atmosphère de cet album respire plein de bonnes choses. A lire dans la continuité !
Welcome back to Eaux-Folles ! Voilà le 5° tome d’une des séries les plus folles justement de Delcourt. Depuis un peu plus de 10 ans maintenant, Turf nous convie à visiter ce monde loufoque qu’il a créé en nous présentant les aventures de Clément XVII, Roi débonnaire d’un improbable royaume régit par de complexes mécanismes. Les objets, l’architecture, le bestiaire, la galerie de personnages, tout est savoureux, inventif, drôle, incroyable et trouve une cohérence dans cet univers pourtant complètement déjanté. Ce dernier tome renoue avec Clément, qui fut emprisonné tout le tome précédent et, de petites séquences en petites séquences, les autres personnages suivront leurs itinéraires divers pour nous montrer la progression de leurs intrigues respectives et ainsi devenir chacun une pièce d’un puzzle géant qui s’arrange petit à petit devant nos yeux. Puzzle est le titre de cet album ? Tiens donc ! En tout cas, alors que beaucoup d’autres lecteurs ont perçu un ralentissement dans le rythme de cette saga inclassable, je ne retiens que le plaisir un peu égoïste que nous offre Turf en nous permettant d’errer nonchalamment dans son univers, sa ville, son royaume, à la rencontre de ses personnages, ses références, ses hommages (les schloumpfs, Dupont (d ?), les éphémères) et son graphisme à nul autre pareil ! On passe de couleurs détourées à de pleines pages admirablement agencées en passant des effets graphités en rupture avec l’élégance raffinée des autres planches… Un régal graphique, un délire scénaristique, un bonheur pour le lecteur…
3 faisceaux m’ont éclairé le chemin qui mène à « Henri, fils de ses parents ». Le premier fut la présence de Mathis comme scénariste de « Vincent mon frère mort-vivant » paru dans la collection Latitudes de chez Soleil. Le deuxième fut ma lecture de « Pirouettes » de Charles Dutertre qui était édité au Potager Moderne. Le troisième fut une rencontre virtuelle avec un Directeur Editorial qui se démène pour faire vivre sa passion par son implication et qui mérite d’être soutenu, Stéphane Godefroid. J’avais donc un oeil beaucoup plus attendri pour découvrir les 5 historiettes que nous proposait Mathis dans ce petit écrin à la couverture glacée. Henri est un enfant des années 70 qui vit dans les Vosges dans une cellule familiale modeste dont le père, maçon, est le chef autoritaire qui a un perchant certain pour la boisson. Malgré tout, Henri ne manque de rien et vit sa vie de petit garçon ordinaire confronté à ses premières adversités et jamais le dernier partant pour faire les bêtise que tout enfant fait. Grâce à une finesse précieuse, Mathis nous offre une double lecture de son album, nous contant avec pudeur et humour les désarrois, qui se révèlent parfois marquants pour une vie, que vit Henri, peut-être une prolongation personnelle de ce qu’il était lui-même… Avec beaucoup de justesse, il touche son lecteur en l’emmenant sur les chemins d’une insouciance que vient perturber de plus en plus régulièrement des éclairs de conscience. Tour à tour enthousiaste puis désespérée, sa vie est rythmée par des émotions qui se font fortes et communicatrices, je vous l’assure, et les silences qui sont suggérés sont évocateurs pour tous. Le talent se reconnaît à cette facilité à faire passer ces émotions. Un dessin particulier mais envoûtant, une calligraphie qui se rapproche de l’écriture d’enfant tout en renforçant ce sentiment de lecture d’un journal intime, je ne trouve que 2 défauts : le « nan » des cases 3 & 6 de la page 9 et le « stop » de la case 5 de la page 28 qui sont trop police de caractères informatique. Mais ça ne nuit en rien à l’ensemble ! Si vous aimez les Légos, les passages oniriques durant lesquels on s’imagine plus fort que tout le monde (aaahh cette stratégie du loup !), si vous voulez passer de la dureté à la légèreté sans manichéisme, si vous voulez sourire et rire de vos propres expériences, alors ce livre est fait pour vous. Un très très chouette album !
Un album acheté sur les conseils, avisés, d’Hervé, serial-chroniqueur bien connu. Cependant, j’ai mis du temps à le lire, repoussant sans cesse l’échéance car le monde de l’aviation a cessé de me passionner à la sortie de l’enfance. Et pourtant… C’est superbement dessiné. Romain Hugault est resté dans cette fascination qui devait l’animer lui aussi depuis très jeune tant il met de minutie et de talent à restituer les avions d’époque et à la faire évoluer dans d’épiques conditions de batailles. Mais l’histoire serait-elle à la hauteur du talent graphique d’Hugault ? Et bien les premières pages constituent un chapitre suivi d’un autre qui nous décontenance un peu mais qui prend rapidement toute sa signification pour une éblouissant final remarquablement amené. Il s’agit de tranches de vie de 4 pilotes de 4 nations différentes qui verront leur destins converger avec une subtilité que je vous laisse découvrir. Il y a tous les ingrédients d’une grande et belle production mais aussi tous les sentiments prenants d’une œuvre plus intimiste. C’est intelligent, dessiné avec talent, prenant, bref, une réussite que je vous recommande.
Ce second volume des récits de Carmen & Travis a très mauvaise presse, comme finalement beaucoup de spin-off que l’on trouve dans nos bacs, la mode aidant… Relativement déçu moi aussi par le premier qui était loin de l’esprit des 2 séries mères, c’est avec appréhension et a priori que j’ouvrais celui-ci. Et c’est bien parce que j’avais un esprit négatif que je n’ai pas trouvé aussi nul que ça cet album. Outre le fait qu’il permette de faire leurs armes à plusieurs dessinateurs (procédé condamnable qui s’éloigne de la tradition du magazine bd), il tente de livrer quelques explications sur l’univers personnel des 2 héros que sont Carmen et Travis. Mais je dois reconnaître que c’est très inégal et que ça se lit vraiment très très vite. Pour une bonne trouvaille comme la schizophrénie d’une entité domotique, combien de pages assez creuses ? Beaucoup trop. Mais le meilleur est pour la fin et la dernière histoire mise en dessin par Yoan, avec un thème pourtant lassant, nous laisse un sourire en refermant un album qui, il faut l’avouer, est très dispensable.
Amateurs de steampunk, cet album est pour vous. Corbeyran construit un univers déjà exploré dans la série du « Réseau Bombyce » et a su s’entourer de brillants dessinateurs pour mieux rendre les aspects grouillants, poisseux et torturés de villes improbables. Dans ce 2° album, les auteurs nous proposent de mieux comprendre les liens qui existent entre certains protagonistes du premier album, les raisons qui les motivent, et pourquoi Aristide Nyx est une sorte de point central de toute cette machination. Dans un climat particulièrement violent, Moreno dessine le triple itinéraire du Régulateur Nyx qui court après son histoire passée, après la vérité de ce qu’un petit cylindre lui révèle, et après son appareil qui lui permet de survivre. Mais pourtant, la surprise du tome 1 passée, on est moins réceptif peut-être à quelques ressorts scénaristiques qui nous conduisent vers des évidences et donc, vers une relative déception. Je ne sais pas combien de tomes sont prévus pour cette série mais il faudra la clôturer sur un cycle relativement court pour ne pas lasser et casser la dynamique positive dont elle jouit. Ceci dit, on se laisse tout de même porter dans cet univers baroque qui fourmille de détails.
Slender Fungus. Une série policière de la collection Grafica de Glénat. Une collection qui sort des séries pétillantes d’humour comme « Outlaws » de Dieter et Fourquemin ou encore d’humour noir (dans tous les sens du terme) comme « Les corruptibles » de Pendanx et Brézault sans qu’on en parle trop… Etrange… Mais il y a tellement de choses à lire… Ozanam et Laigle, dont c’est la première série, nous livrent une histoire policière de l’après-guerre américain en évitant l’écueil du récit convenu malgré un sujet archi-connu. Après un premier tome passé à courir après cette arlésienne qu’est Slender Fungus, le deuxième tome nous conduit plus loin dans l’intrigue et l’étau se resserre inexorablement sur cet insaisissable truand. La galerie de portraits proposée est dans la continuité du premier tome et ce sont des personnages déjantés, caricaturaux, mais efficacement croqués qui nous servent de repères dans cette histoire où les flingues sortent plus vite que les politesses ! C’est drôle, souvent, violent, et d’un style vraiment accrocheur, le tout avec des cadrages subjectifs qui sont vraiment très efficaces. Les couleurs utilisées contribuent grandement à entretenir cette ambiance de sueur, de sang et de fumée épaisse qui rendent plus opaque l’intrigue ! Le dénouement approche et j’ai hâte de le découvrir ! J’espère que vous aussi !
Intrigué par les bons échos autour de cet album, et voyant qu’il ne s’agissait ni plus ni moins d’O Groj’ et de Tarrin aux manettes, je me décidai à acquérir mon exemplaire de « Et Dieu créa le yaourt à la framboise ». Le titre, déjà tout un programme ! Je m’attendais, il faut l’avouer, à un truc bien débile, mais dans le bon sens du terme ! Et bien on est servi ! Mais à y regarder de plus près, c’est beaucoup plus fin que ce que ça laisse paraître ! 46 pages de gags loufoques et délirants pour de francs éclats de rire avec comme trame de fond « Le jour des marmottes », où chaque jour se ressemble et apporte son yaourt aux pruneaux et son yaourt à la framboise, délicieusement meilleur ! Bien sûr, des conflits naissent et le maître de ce monde sera le seul autorisé à juger : Dieu, pendu à un fil, remettra ses ouailles dans le droit chemin à chaque fois qu’ils s’en écarteront ! Le rythme est enlevé, soutenu, rapide, une cascade de gags qui nous conduisent dans ce que l’on croit être des impasses et, avec ingéniosité, les auteurs trouvent des ressorts pour repartir de plus belle… Comme un grand dessin animé du génial Tex Avery ! Les plus pieux lecteurs seront peut-être choqués par l’image de ce Dieu un peu responsable de la dérive de sa micro-société (voir en cela les lettres reçues par Tarrin sur son site) et les esthètes seront choqués par ce faux sticker « Pif » qui vient pourrir la couverture ! Le reste, c’est du tout bon, à la framboise, mangez-en ! ;o)
Il y a comme un parfum de légèreté qui se dégage de ce diptyque. Et pourtant… Le sujet est grave… La résistance, les milices, la torture… Michelle, l’héroïne un peu perturbée de Fanny Montgermont, continue de tracer innocemment sa route dans un monde en chaos, très sensiblement perceptible dans le conflit qui l’oppose à son père. Hyppolite, fasciné, se laisse hypnotiser par celle qui lui a déjà, même involontairement, sauvé la vie… Au risque de mettre en péril les actes résistants dans lesquels il s’est engagé ? La rêverie poétique du premier tome laisse place à une action plus trépidante, mais conserve toutefois cette énigmatique question sur le statut de Michelle : est-elle surnaturelle ? Entre réalité et rêve, Fanny Montgermont nous promène à la limite de la contemplation. D’un dessin relativement simple et épuré, le tout rehaussé de couleurs souvent pastels, elle parvient à donner une force difficilement descriptible à son récit… On aurait aimé rester en compagnie de ces deux sympathiques personnages plus longtemps…
Cette chronique devrait commencer par un tonitruant « WAHAHAHAHAHAHAHAHAHA » bien sonore, expression des fous rires nombreux que vous aurez en lisant ce livre. Cette onomatopée est aussi liée à un délire qui a longtemps duré (près de 6 mois) sur les foras lors des devinettes et jeux de pistes acharnés sur l’identité secrète de l’entité Frantico. Ce blogstar est toujours bien inconnu de tous mais les rumeurs se sont arrêtées en même temps que son blog… Un teasing infernal pour une production papier qui suivit quelques mois plus tard le phénomène. Un blog, c’est un journal intime dans lequel l’auteur se raconte, de manière romancée, crue, réelle, nul ne peut jamais savoir ! En l’espace de 6 mois, Frantico a réussi à réunir 8.000 visiteurs par jour et les inviter à la découverte de la vie au travers de son regard cynique… Il y va de l’obsession sexuelle qui a freiné beaucoup de lecteurs (et pourtant cette obsession, cette misère devrais-je dire, n’occupe qu’un tiers des planches de Frantico !), aux petits tracas de la vie, aux invitations mondaines, aux super-pouvoirs… Une vraie bonne tranche de rigolade pour qui préfère voir le second degré des œuvres de Frantico qui recèlent de la sensibilité, de la douceur, de la poésie, à des endroits qui sont parfois d’une extrême crudité ! En tout cas, je vous recommande cette version papier qui fait un joli bouquin, surtout si vous n’avez pas le net pour découvrir le blog (mais là, je me demande aussi comment vous pouvez lire ma chronique ! WAHAHAHAHAHAHA !).
Rosinski nous apprend en post-face la renommée de ces 2 auteurs polonais qui ont mis tant de temps à être publiés en France… Pourquoi ? Casterman prenait le risque éditorial et nous offrit ce récit hors-normes. Hors-normes dans tous les sens du terme tant il est surprenant dans sa façon d’aborder l’horreur de la déportation, le tout servi par un graphisme peu commun… Zelig père et fils fuient la déportation mais tombent dans les bras d’une patrouille allemande dirigée par un énigmatique personnage utilisé métaphoriquement comme les nombreux pantins qui ont été manipulés durant cette période terrible. Loin des représentations habituelles de la narration de cette époque, les auteurs nous conduisent sur un chemin onirique et fantasmé qui retrace les absurdités et l’horreur qui dévasta la Pologne durant ces heures sombres… Je vous laisse découvrir les nombreuses trouvailles remarquables d’intelligence qui font de ce livre un angle de compréhension novateur et effrayant, absurde et grotesque, magique et fascinant… Les couleurs renforcent la froideur de cette ambiance proche de la folie…
Ouille aïe aïe ! Double claque ! Je poursuis ma découverte de l’univers incroyable et riche de Morgan Navarro par la suite plus adulte de Flip paru chez Bréal Jeunesse (ma chronique est diponible sur ce merveilleux petit album). Les enfants ont grandi et leur insouciance, leurs rêves, a laissé place à une réalité plus brutale qui se déroule dans une banlieue difficile ou l’indicible est souvent le quotidien banal des résidents. Flip est devenu auteur de comics, tente d’en vivre, voit ses amis zoner, et son amour de jeunesse devenir une sorte de généreuse strip-teaseuse prête à de nombreuses folies sexuelles. Malgré tout, Flip est assailli de cauchemars, est troublé car il a gardé une sensibilité et une âme d’enfant que ses camarades ont perdu, et il voudrait être romantiquement amoureux de sa belle qui est dans un autre trip. Je vous laisse déguster cet album qui est comme un poil à gratter par les réflexions de société qu’il ne manque pas de poser et vous laisser découvrir aussi la tendresse qui se dégage malgré tout de ce brutal constat. Un superbe album qui confirme les talents de narrateur de Morgan Navarro. Son prochain album arrive, lisez vite ces deux-là avant de vous précipiter sur « Sleep Flip » qui continuera d’explorer les mœurs post-adolescentes avec la même acuité. Rhaaa, j’en redemande…
David de Thuin continue dans ce tome 2 à explorer ces sentiments forts et fragiles à la fois qui se tissent dans une famille dont on comprend qu’elle ne comporte pas de père. Les frères sont toujours différents mais vivent sous le même toit et la douleur collatérale qu’ils ressentent face à la maladie de leur mère a des expressions diverses. Mais puisque j’aborde le thème des sentiments, voilà qu’ils se révèlent multiples dans cet album. Car l’auteur aborde aussi les doutes du créateur, son découragement, ses faiblesses, le dégoût des rouages de son métier même. Par exemple, celui que lui inspire le battage médiatique fait autour des aventures dessinées au scénario indigent d’« Hyperclébard », le héros local. Il n’est pas possible de ne pas voir là un parallèle entre la création et le façonnage de petites perles comme celles que l’on trouve chez les éditeurs indépendants, et les « blockbusters » de chez Soleil ou la promotion énorme dont bénéficient des auteurs comme JJ Beineix et autres pipeules ! Ce sentiment est d’autant plus renforcé par le personnage de Raphaël, sorte de JC Menu local, qui se décide d’entrer dans une niche différente de l’édition industrielle. Comme quoi, tous les débats immenses générés par la sortie de l’oeuvre polémique « Plates-bandes » peuvent être habilement et finement résumés en quelques cases et dessins agencés par une main habile et un regard plein d’acuité. C’est ça, paraît-il, le talent. Autre phénomène ressenti à la lecture du Roi des Bourdons, et mon interprétation faisant le reste, c’est celui lié à la reconnaissance. Je m’explique. Zola rêve de réussir, d’être parfois quelqu’un d’autre, ce que nous avons tous déjà rêvé d’être une fois dans sa vie, enviant parfois les gens célèbres, ou ayant été un peu lâches dans certaines situations… Si on applique ce raisonnement au métier d’auteur, et que je me permette d’extrapoler, il y a un parallèle fait avec ce besoin de reconnaissance du public qui apprécierait le travail de l’auteur, et la peur de subir les pressions et effets pervers de cette notoriété nouvellement acquise. Une sorte de pression cérébrale et intellectuelle (tiens, comme un bourdonnement, étrange non ?) difficile à gérer qui génère un sentiment d’attraction répulsion qui peut trouver des solutions dans des fuites psychotropiques. En cela, j’ai interprété la prise de « gelée » comme cette substance émotionnellement palliative qui permet à Zola de résister à ces éventuelles pressions responsables d’angoisses récurrentes, celles que l’artiste rencontre régulièrement lors de son processus créatif. La gestion de ce besoin de reconnaissance (représenté par la gloire lié à l’héroïsme du personnage principal) et les travers et risques qui en découlent (toujours bien faire, être attendu…) sont au centre de l’hyperbole de l’auteur me semble-t-il. En tout cas, sous des dehors qui n’ont pas l’air d’être aussi sérieux que cela, David de Thuin creuse des pistes riches, lourdes, fortes, avec un ton léger qui nous entraîne dans une passionnante chronique qui nous rend hagards et vides, juste pris par le désir imminent et consumant de lire la suite. Les mangakas sont les rois pour maintenir le suspense et déclencher l’envie du tome suivant, David de Thuin serait donc, selon cette courte et castratrice définition, un excellent mangaka !
Caravan par Coacho
A mon tour de m’extasier… Purée… J’ai mis du temps à lire ce pavé par manque de temps et de motivation. Je n’aurai aucune prétention dans mon billet du moment car je ne suis pas à la hauteur de commenter les 858 ( ?) pages magiques de Joann Sfar. Je souhaitais juste faire partager mon coup de cœur, mon envie, mon enthousiasme et vous recommander chaudement la lecture de Caravan… C’est drôle, fin, émouvant, riche, intelligent, dense… On passe de la théologie aux aventures de Raoul. On passe de réflexions grivoises aux interrogations existentielles. On se délecte de la lucidité de Tautmina et de l'éblouissement de son père. On partage les réflexions de l’auteur sur tout et sur rien… Philosophiques ou sportives… C’est toujours passionnant, y’en a partout, et le dessin de Sfar est expressif, éclatant, rapide, instantané… Une découverte pour ceux qui ne seraient pas familiarisé avec un auteur dont on parle beaucoup, mais quand on le lit, on comprend qu’il soit si courtisé… La musique occupe une grande place passionnelle, mais cela rythmera vos soirées de lecture ! Enfin, et ce n’est pas rien, Nice, ses expressions, ses lieux, ses coutumes, ses plats, ça me parle donc forcément… Bravo et merci pour ce carnet…
Bon... Ben... Voilà... C'est lu... Je garderais toujours en moi les fous rires provoqués par Astérix et ses aventures, c'est indéniable. Je continue de voir un dessin impeccable, irréprochable. J'ai vu ci ou là quelques cases, avec quelques saillies humoristiques, mais je dois avoir trop vieilli... Les plus jeunes auront-ils le même plaisir de lecture ? Je ne sais pas, ce n'est pas mon propos... Outre les regrets que m'inspirent ces personnages qui viennent d'apparaître dans cet album, c'est plutôt sur le vieil homme passionné mais un peu trop face à lui-même que je voudrais m'arrêter un instant... Cet Astérix, il ne l'a pas fait pour de quelconques conditions financières, j'en suis persuadé, sa fortune étant déjà colossale ! Alors pourquoi ? Comme ces personnes âgées qui continuent de se lever tôt pour continuer ce qu'ils ont toujours fait, Uderzo fait sûrement ce qu'il a toujours su faire : dessiner. Dessiner encore et toujours, émerveiller les enfants, raconter des histoires. Je le crois sincère, je n'en doute pas une seconde. Mais en vieillissant, il a dû se sentir un peu exclu d'un monde Bd qui lui échappe. Avec sa vision de Nagma, il a une vision acide et peut-être même rétrograde du phénomène manga. Alors que ses super-héros sont relativement épargnés quoique un peu niais, ses personnages nippons sont sujets à des railleries à la limite du raisonnable. Que penser du réel danger que représentent les Nagmas ? L'invasion du monde de l'édition par ces petits livres japonais, ou le péril jaune lui-même ? Que penser des assertions de Toune (ce sont des gens sans scrupules", "ils vont vous tomber dessus pour se l'accaparer", "ils sont envieux, vindicatifs", "ils nous copient mais ils sont moins avancés que nous sur les connaissances scientifiques", etc...) ? Voilà... C'est un peu peiné que je referme cet album mais je préfère garder en tête la hutte finale ou la case de la pyramide de romains cramés qui pointent du doigt leur chef... Pour que ma mémoire ne ternisse pas les heures sacrées que j'ai passées avec Astérix...
Un sujet revient souvent dans les discussions des passionnés de BD : les influences. Ca va de la filiation, au vulgaire pompage, en passant par des phases d’emprunt, d’hommage ou de référence. Mais il faut éviter ces comparaisons faciles qui proviennent de notre inévitable besoin de comparer, de compiler, de référencer. Il faut voir certains univers comme étant la digestion de ses influences et l’affranchissement de l’auteur qui construit, avec des mots qui peuvent déjà exister, sa propre histoire. Les rêves de Milton ont une résonance pour le lecteur que je suis… Non, Billy n’est pas Jamel Debbouze et sa main, il la cache pour une raison que je vous laisserai découvrir en lisant l’album ! Mais trêve de plaisanterie… Je disais donc que l’univers développé dans ce tome 1 de ce qui s’annonce comme un magnifique récit post-dépressionnaire, est très proche de ce que pouvait écrire Steinbeck. Peut-être suis-je en train de risquer un amalgame facile et c’est pour cela que je vais m’en éloigner. Quoi qu’il en soit, comme le célèbre écrivain avait l’habitude de planter son décor, Sylvain Ricard et Fred Féjard nous emmènent dans ces années troubles qui virent l’avènement d’un communisme, qui voulait plus d’humanité et tentait d’en offrir avec sa révolution de 1927, et où le capitalisme montrait ses faiblesses et était sur le point de mourir avec la crise de 1929. En se plaçant en 1930, les auteurs allaient nous décrire des conditions de vie effroyables pour les hommes et femmes qui avaient subi si violemment cette tragique récession. Les mœurs américaines en étaient chamboulées et, dans la boue, dans la saleté, dans la misère, nous découvrons des êtres humains prêts à tout pour survivre. A la limite de l’étouffement, de l’agonie, tout est bon pour survivre. Les cases de la page 14 suggèrent d’ailleurs fortement ce qu’une mère est prête à faire pour subvenir aux besoins de ses enfants… malgré les remords et la culpabilité que la démonstration de ce sacrifice implique… Et cette situation continue de montrer les hommes sous des travers souvent plus bestiaux, avides et prêts à la plus grande violence. Certains profitent de cette détresse pour s’enrichir à peu de frais, forçant ces pauvres gens à délaisser le peu qu’ils ont, et auquel ils sont attachés (p. 36 et les adieux de la mère), pour croire en quelque chose de meilleur, un ailleurs qu’ils espèrent plus prospère. L’ironie du sort voudra que les cultures asséchées du père de Billy, le jeune homme qui fait office de personnage central, verra enfin la pluie tomber lorsqu’il se sera séparé de ses terres (p. 20 à 23)… Dans ce voyage qui doit les emmener ailleurs, la galère, mais aussi la mort, planera durant toute cette migration (voir p. 42 la présence des corbeaux au campement, discrètement placés). Mais, au milieu de ce désespérant tableau, évolue Milton, sorte de grand gaillard rêveur et simplet (puis-je le comparer au Lenny de Steinbeck ?! ;o)) qui apporte sa fraîcheur et sa candeur comme une éclaircie tangible. Cette bonne humeur et cet amour qui émane du personnage tranche nettement avec la souffrance et la frustration de Billy, son frère, handicapé par une blessure qui résulte d’un événement qu’il n’aurait jamais du voir… Cette désillusion, ce peu d’espoir en l’avenir, ce fait d’être désabusé agira comme un poison dans les veines de ce jeune homme qui se livrera à quelques écarts et le poussera à quelques errances en manipulant les sentiments de Milton et lui faire faire des choses répréhensibles… Ce qui est formidablement orchestré puisque l’ambiguïté réside avec un Canadien qui accompagne les pionniers… J’en ai peut-être déjà dit beaucoup trop mais j’ai eu tellement de plaisir à me replonger dans ces univers proches des « Raisins de la colère » ou « Des souris et des hommes » que je me suis laissé aller ! Le dessin est sale, poisseux, anguleux, volontairement témoin de cette misère dont il est question et si parfois il souffre d’imperfections, ou de défauts que certains auront déjà cités, il n’en est pas moins idéalement représentatif de l’ambiance générale de l’histoire. Quelques défauts qui m’ont interpellés peut-être ? Billy qui, lorsqu’il subit son agression, ne hurle peut-être pas assez (p. 6) ? Et peut-être la bulle en trop page 21 « Tant que tu garderas notre petit secret… » car je crois que venant de lire les pages précédentes, le lecteur avait très bien la situation en tête et pouvait se passer de cette bulle, les autres étant plus fines dans l’allusion et auraient été suffisantes en tant que telles. Mais c’est là tout ce que je pourrais reprocher à cet album qui m’a, vous vous en doutez, emballé ! Il ne nous reste plus qu’à suivre ce papillon qui détonne par ses couleurs dans la vie grise des personnages et espérer que l’effet papillon, même si on se doute qu’il sera terrible, ne soit pas trop tragique… Mais j’en doute… En attendant de lire cette fin poignante, je remercie les auteurs, et Sylvain Ricard en particulier pour le reste de son travail, de nous donner de si bons livres avec une telle qualité… C’est chez « Aire Libre » ? Ah oui, c’est normal alors ! ;o)
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