Et bien, passer après de tels scripteurs, il va être délicat de sortir quelque chose de novateur et de correct ! Cette BD, on l'achète sur la foi de la couverture... Magnifique, inspirée, pensive, poétique... Le reste ? Plus qu'une histoire, plus qu'une intrigue, c'est au sentiment qu'on laisse place ! Je ne raconterais pas l'histoire, ni les hypothèses naissantes sur la date de naissance des 4 amis... Non, je m'attarderais sur le rythme... Voilà... Dargaud a laissé 96 pages pour l'expression d'une lenteur toute sudiste... Car ce Soleil qui rend la mer si belle, c'est aussi l'acteur principal de cette histoire... La chaleur nous emporte, celle des sentiments, celle de la température, celle des fièvres des premières herbes fumées, celle des corps amoureux... Et puis tout y est abordé avec délicatesse, sagesse et douceur... La xénophobie y est montrée habilement, sans manichéisme, sans poncifs, l'amour juvénile se veut léger et papillonant, jamais pesant, les amitiés sont sincères et les drames profonds... Tout le charme de cette BD, avec ses imperfections, c'est de savoir nous faire flotter comme dans un rêve... Bien sûr certaines choses sont critiquables, comme certains cadrages, ou alors la difficulté de compréhension de l'insertion des planches noires, celles des flash-back... Mais qu'importe ? Le sentiment qui nous étreint à la lecture de ce conte de début de siècle est bien réel, et c'est bien là l'important... Mon inquiétude réside dans la construction du 2° et dernier tome de cette aventure... Car si tout le charme d"Où le regard ne porte pas..." réside justement dans la justesse d'expression des visages et des regards des personnages, son contenu est celui de l'enfance, avec toute sa naïveté et son naturel... Si nous devons suivre les aventures de ces enfants devenus grands, la perversion aura-t-elle fait son chemin et le charme agira-t-il de la même façon ? En tout cas, j'ai hâte de me délecter de cette suite et je m'empresse de vous conseiller l'achat de cet album, qui tombera sous le charme de votre regard, peu importe où il porte...